Alors que la classe énergétique des maisons individuelles commence à avoir un impact sensible sur leur valeur immobilière, une enquête de l'UFC-Que Choisir montre que les diagnostics de performance énergétique (DPE) manquent singulièrement de fiabilité ! L'association de consommateurs a demandé à cinq diagnostiqueurs d'établir un DPE pour le même pavillon d'Ile-de-France. Résultat : une consommation d'énergie estimée qui passe du simple au double, et des émissions de gaz à effet de serre qui font le grand écart ! Plus quelques constatations inquiétantes : l'un y voit une chaudière au gaz naturel alors que les propriétaires se chauffent au fioul, un autre établit son rapport sur la base d'un appartement de 200 m2 alors qu'il s'agit d'une maison individuelle de 100 m2, un troisième mentionne un chauffe-eau électrique qui n'existe pas...
Autre expériences : trois professionnels ont classé une maison de plain-pied à Nantes, construite dans les années 70 en D, deux autres en E. En Haute-Loire, une grande maison de village qui a participé à l'enquête se retrouve pour les uns en E, pour les autres en D. En termes de facture énergétique ça change tout. A Montpellier, l'écart de consommation se monta à 80% ! Même chose à Lille, où une maison en briques caractéristiques du Nord a droit elle aussi à deux classes énergétiques différentes. Mais le record est battu par un pavillon des Vosges avec un classement en E, en F ou en G selon les intervenants !
En matière de recommandations de travaux, l'autre volet exigé dans les DPE, ça ne va pas mieux. Les principales déperditions d'énergie sont dues aux murs selon Agenda Diagnostics, qui leur attribue 35% du total à Lille, mais Diagamter ne les juge responsables qu'à 17%. Dans le premier cas, les propriétaires vont juger l'isolation des murs prioritaire, dans le second cas elle ne l'est pas. En Ile-de-France, deux des cinq diagnostiqueurs n'ont même pas préconisé de VMC, alors que c'est le préalable indispensable aux travaux d'isolation qu'ils ont recommandé ! Impossible, en effet, d'éviter la condensation et les moisissures sans VMC dans un logement isolé.
A Nantes, les propositions de travaux sont si différentes que les auteurs de l'enquête se sont demandé si les diagnostiqueurs ont visité la même maison ! "Il y a également de quoi être perplexe à Pau, les uns conseillent d'isoler, les autres pas ! Certains ne savent même pas que les travaux d'économie d'énergie donnent droit à un crédit d'impôt de 30 %, ils l'indiquent à 15 %, voire à 26 % ou encore à 38 %. C'est tout aussi folklorique sur la prise en compte des énergies renouvelables. L'imposant poêle alsacien des Vosges a parfois été ramené au rang de vulgaire chauffage d'appoint qui n'apporte rien", poursuit l'UFC dans son commentaire.
Cinq ans après leur précédente enquête sur les DPE, la situation ne s'est donc visiblement pas améliorée. Ce sont pourtant les résultats désastreux d'alors qui avaient conduit les pouvoirs publics à renforcer les exigences... "En décidant d'imposer l'étiquette énergie aux biens immobiliers en 2010, le gouvernement revendiquait un objectif clair, à savoir accélérer la prise en compte de la valeur verte des logements pour améliorer la performance énergétique du parc immobilier", rappelle l'UFC. Dès 2015, cet objectif paraissait en passe d'être atteint : analysant les bases notariales de ventes de maisons sur l'année 2014, l'association notariale Dinamic avait relevé, pour des biens comparables, un écart de valeur de 5% en moyenne par classe énergétique en province. Par rapport à la classe D, prise comme référence dans l'étude, une maison classée en C s'était vendue, par exemple, 7% plus cher en Occitanie, mais 6% moins cher si elle est en E et 15% de moins si c'est en F ou G ! En Nouvelle Aquitaine, c'est +5% en classe C, mais -8% en classe E et -18% en F ou G. A l'exception de l'Ile-de-France, où le marché très tendu minimise les différences, on retrouvait donc déjà des écarts importants d'une classe à l'autre dans toutes les régions. Même s'ils sont moins élevés dans les Hauts-de-France, c'est tout de même +3% en classe C, -5% en E et -12% en F ou G. Quant au prix des maisons particulièrement bien isolées qui consomment peu d'énergie, il avait déjà tendence à s'envoler. Lorsqu'elles sont classées en A ou en B, la surcote était de +13% en Occitanie, et +14% en Bourgogne-Franche-Comté et en Nouvelle-Aquitaine.
Le Conseil supérieur du notariat vient de réactualiser l'étude en se basant sur les données des transactions effectuées en 2016. Sans surprise, elle confirme l'impact de la classe énergétique sur le prix de vente des maisons en province, à la hausse comme à la baisse. De même que la décote liée à la classe E, la surcote apportée par la classe C reste identique. La dévaluation due aux classes les plus énergivores, F et G, demeure importante, avec de gros écarts selon les régions.
D'où l'importance de DPE fiables, identiques quelque soit le diagnostiqueur ! On en est visiblement loin...
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