Reprenant ses précédentes études de 2014 et 2015, la CLCV (Confédération logement et cadre de vie) s'est à nouveau penchée sur les litiges rencontrés par les consommateurs en matière de travaux, qu'ils s'agisse de la construction d'une maison ou d'opérations plus modestes telles la réfection d'une salle de bains ou l'installation de panneaux photovoltaïques. 320 dossiers qui ont été examinés, émanant aussi bien du réseau de la CLCV que de témoignages spontanés sur leurs sites. Le constat est que la situation ne s'améliore pas, loin de là.
Sans surprise, les malfaçons constituent le premier fléau en matière de travaux puisqu'ils représentent 43% des litiges, loin devant les cas de non-conformité (22%) ou les retards et abandon de chantier (20%). Et les dossiers deviennent de plus en plus complexes : alors qu'auparavant, le consommateur ne subissait plusieurs types de litiges que dans de rares cas, ceux-ci deviennent désormais plus nombreux. En 2014, on ne constatait un cumul des litiges (retard et malfaçons par exemple) que dans 17% des cas alors que ce chiffre atteint désormais 36%.
Par ailleurs, les retards et autres abandons de chantiers deviennent plus fréquents, passant de 9% à 20% entre 2014 et 2017. Faible consolation, les cas de dépôts de bilan sont plus faibles (7% cette année contre 14% en 2014), mais comme nous l'avons vu, ce résultat est à nuancer avec l'augmentation parallèle des abandons de chantier.
Pour la CLCV, la protection du consommateur est très variable d'un domaine à l'autre. Si elle est de bonne facture en matière de construction d'une maison (sous réserve d'en passer par un contrat de construction en bonne et due forme !), elle l'est nettement moins en cas de travaux de moindre importance. "Dans bien des cas, les prétendus contrats signés par le consommateur ne sont que des devis, mentionnant uniquement le montant des travaux, mais ne portant aucune indication sur, par exemple, la date de commencement du chantier ou sa durée", indique la CLCV. "De même, on ne trouve jamais de clauses fixant des pénalités de retard lorsque le professionnel ne termine pas le chantier dans les temps. Et il est inutile d'essayer de négocier ce point, les contrats proposés étant souvent des contrats d'adhésion n'offrant aucune marge de manœuvre au consommateur".
Enfin, la CLCV déplore une méconnaissance générale chez les clients des droits des consommateurs en matière d'assurance, les notions de garantie décennale et de dommage-ouvrage étant très confuses pour eux.
La CLCV demande en conséquence de rendre obligatoire la signature d'un contrat écrit pour les travaux d'un montant supérieur à 150 euros TTC, contenant obligatoirement certaines mentions, dont la durée du chantier, sa date d'achèvement, les modalités de paiement, de fixer un seuil minimum de pénalités de retard en fonction du montant des travaux (5% par jour de retard par exemple), ou encore d'imposer aux professionnels la souscription d'une garantie de livraison pour tous les travaux supérieurs à un certain montant (1.000 euros TTC par exemple). Ainsi, en cas d'abandon de chantier ou de dépôt de bilan, le garant sera chargé de poursuivre les travaux, sans supplément de coût pour le consommateur. Egalement de communiquer une fiche d'information pédagogique présentant au consommateur les différentes garanties existantes...
Travaux : contre les litiges, faut-il créer un nouveau type de contrat ?
Stéphanie Odéon, le 22/08/2017 à 16:36
Travaux escalier litiges
Image d'illustration © S.O. pour Batiactu
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REACTION. Face aux litiges en matière de travaux, faut-il mettre en place un nouveau type de contrat pour mieux protéger les consommateurs ? La proposition fait vivement réagir la Capeb.
Reprenant ses précédentes enquêtes de 2014 et 2015, la CLCV s'est une nouvelle fois penchée sur les cas de litiges rencontrés dans le cadre de travaux et de construction. La récente enquête montre que les malfaçons restent sur le podium des litiges avec 43% des cas, loin devant les non-conformités (22%) ou les retards et abandon de chantier (20%). Toutefois, l'association de défense des consommateurs note que le taux de malfaçons a diminué de 7% par rapport aux précédentes enquêtes et se demande s'il s'agit là "peut-être" des "prémices d'un signe d'une amélioration de la compétence des professionnels ?".
Elle note également une diminution de cas de dépôts de bilan (14 % en 2014, 7 % en 2017) sans pour autant s'en réjouir : "cela ne doit pas nous rassurer sur la solvabilité financière des entreprises puisque, sur le même intervalle, les retards et abandons de chantier sont passés de 9 % à 20 %, soit une augmentation de plus de 122 % !".
La création d'un contrat proposée par l'association
L'association constate que la protection des consommateurs "est très variable d'un domaine à un autre". Si elle est bonne pour la construction de maison, elle l'est beaucoup moins pour les travaux de "moindre importance", "la faute à l'absence de dispositions fixant un formalisme minimal", estime la CLCV. Dernière constatation : il y a "une réelle méconnaissance des droits des consommateurs en matière d'assurance, les notions de garantie décennale de dommage-ouvrage étant très confuses pour eux", est-il indiqué.
Pour améliorer la protection des consommateurs, l'association formule donc des propositions qui risquent de faire grincer des dents les professionnels du bâtiment qui se plaignent déjà des lourdeurs administratives. Elle suggère en effet de "rendre obligatoire la signature d'un contrat écrit pour les travaux d'un montant supérieur à 150 € TTC, contenant obligatoirement certaines mentions, dont la durée du chantier, sa date d'achèvement, les modalités de paiement", "de fixer un seuil minimum de pénalités de retard en fonction du montant des travaux (5 % par jour de retard par exemple)", mais aussi "d'imposer au professionnel la souscription d'une garantie de livraison pour tous les travaux supérieurs à un certain montant (1.000 € TTC par exemple). Ainsi, en cas d'abandon de chantier ou de dépôt de bilan, le garant sera chargé de poursuivre les travaux, sans supplément de coût pour le consommateur ; de communiquer une fiche d'information pédagogique présentant au consommateur les différentes garanties existantes".
"Ils feraient mieux de regarder qui ils prennent avant de se lancer dans des travaux", Patrick Liébus, Président de la Capeb
"C'est du grand n'importe quoi !", réagit Patrick Liébus, président de la Capeb. "Nous avons déjà réussi à éviter de remplir le document pour la TVA à 5,5%, on ne va pas remettre autre chose", ajoute-t-il. La mise en place de ce type de contrat alourdirait encore un peu plus la charge de travail des entreprises, explique-t-il.
Pour lutter contre ces litiges, le président de la Capeb pointe du doigt les modalités du choix des entreprises. "Ils [les particuliers] feraient mieux de regarder qui ils prennent avant de se lancer dans des travaux", estime-t-il. Patrick Liébus leur recommande donc de passer par des entreprises de proximité qui ont pignon sur rue et contre lesquelles ils pourront facilement se retourner. "Il y a une forme de sécurité à passer par des sociétés de proximité", selon lui. Il en profite aussi pour dénoncer une nouvelle fois ces micro-entreprises qui leur font parfois du tort en ne respectant ni les règles, ni la qualité des travaux.
Revenant sur la mise en place d'un nouveau type de contrat, il se demande s'il est aussi prévu des pénalités pour les particuliers qui ne respectent pas les délais de paiement. Patrick Liébus ne comprend pas l'utilité d'un tel document alors qu'il existe déjà des règles en la matière. Pour lui, dès la création du devis il est mentionné le détail des travaux, les modalités d'exécution et de paiement. Mais c'est là le nerf de la guerre pour les artisans. "Aujourd'hui, nous sommes confrontés régulièrement à des retards de paiements. Nous servons de banquier", dit-il amer. "Quand le client nous impose son règlement en trois fois, nous n'avons pas les moyens de refuser", donne-t-il en exemple.
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