Et de deux : après les députés le 17 septembre, les sénateurs ont adopté à leur tour le 26 octobre le projet de loi "Duflot" pour l’accès au logement et un urbanisme rénové ("ALUR"), avec juste quelques modifications par rapport au texte issu de la commission des affaires économiques. Ainsi, les dispositions honnies des propriétaires et des professionnels immobiliers - l'encadrement des loyers, la "GUL" (garantie universelle des loyers), l'encadrement honoraires des professionnels et notamment des administrateurs de biens et des syndics de copropriété, l'obligation de comptes séparés au nom des syndicats des copropriétaires, etc. - sont passées sans encombre et presque sans modification. Rien n'a entamé la détermination de la ministre du logement, Cécile Duflot, ni les communiqués virulents des fédérations professionnelles la traitant d'incompétente, ni le catastrophisme des milieux proches des propriétaires annonçant la fin de l'investissement locatif... Ni même un avis critique de deux experts (indépendants) du Conseil d'analyse économique (CAE), dépendant du Premier ministre, jugeant contre-productives les deux mesures phares de l'encadrement des loyers et de la GUL et donnant des arguments à la coalition des opposants au projet. Quelques semaines avant, deux autres experts du même CAE avaient été voués aux gémonies pour avoir osé avancer, dans un avis sur la fiscalité des revenus du patrimoine, que les propriétaires immobiliers bénéficiaient d'un véritable favoritisme fiscal, allant même jusqu'à suggérer que les propriétaires occupants bénéficient d'un régime bien plus intéressant que les locataires, et qu'une façon de rétablir l'équilibre serait d'imposer les loyers implicites, c'est-à-dire sur le montant des loyers que les propriétaires qui occupent leur logement percevraient s'ils le proposaient à la location ! Vérité aujourd'hui, "élucubrations" hier, selon la FNAIM...
Derrière ces dispositions qui ont monopolisé l'attention des médias - une dizaine d'articles au plus, sur une centaine -, n'oublions pas de nombreuses mesures permettant de sécuriser la rédaction des baux et les états des lieux, notamment lorsqu'ils sont faits par des particuliers sans le concours de professionnels, des obligations de formation et un encadrement des professions immobilières réclamés par les professionnels eux-mêmes pour lutter contre les francs-tireurs, de nombreuses mesures pour améliorer l'information des acquéreurs et prévenir la dégradation des copropriétés, ainsi que pour redresser - voire requalifier - celles en difficultés avérées, ou encore pour la lutte contre les marchands de sommeil et l'habitat indigne. Le projet de loi organise aussi un statut d'habitat participatif, en plein regain, améliore la gouvernance du secteur HLM, et remonte au moins partiellement l'établissement des plans locaux d'urbanisme au niveau de l'intercommunalité, mesure réclamée depuis plusieurs années par les promoteurs et les HLM pour s'affranchir des blocages des maires qui lient leur survie politique à la restriction de la construction de nouveaux logements, notamment sociaux...
Le battage médiatique bien orchestré ferait donc presque oublier ce catalogue impressionnant de mesures attendues et appréciées, même si elles ne font pas nécessairement l'unanimité. Il est vrai que ceux qu'elles contentent se distinguent surtout par leur silence !
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