Chargée de contrôler l'application par les syndics de copropriété professionnels de l'avis du Conseil national de la consommation (CNC) du 27 septembre 2007, fixant la liste des prestations devant être incluses dans leur forfait de gestion courante et ne pas être facturées au titre des "prestations particulières", la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a réalisé deux enquêtes, l'une au 1er trimestre 2008 dont les résultats n'ont jamais été présentés, et dont on sait seulement qu'elle concluait à un taux de conformité de 89%, et une deuxième fin 2008, qui conclut à un taux de conformité de 92%, dont les résultats ont été présentés récemment aux partenaires des négociations ayant conduit à l'avis du CNC.
Très remontées, les associations de copropriétaires et les médias n'ont jamais accepté de croire à ces résultats ; la polémique a été alimentée très tôt par de plusieurs contre-enquêtes "privées", les unes réalisées par des associations de consommateurs (l'ARC, la CLCV, l'INC-60 millions de consommateurs ou l'UFC-Que Choisir) - et des revues comme Le Particulier, les autres par des organisations professionnelles telles la FNAIM (Fédération nationale de l’immobilier), avec bien entendu des résultats en sens inverse !
L'enjeu est derrière cela la mise en oeuvre ou non de la menace initiale formulée par l'alors secrétaire d'Etat à la consommation, Luc Chatel, en cas de non application spontanée de l'avis par les syndics, de le rendre obligatoire par arrêté.
Ayant pris connaissance des détails de la 2ème enquête de la DGCCRF, l'ARC l'attaque frontalement, lui déniant toute légitimité : l'association dénonce notamment la non-représentativité de l'échantillon choisi, privilégiant les grands groupes (les petits syndics ne représenteraient que 30% de l'échantillon alors qu'ils gèrent 60% des lots de copropriété et une proportion encore plus écrasante des immeubles, les petites copropriétés étant en général dédaignées par les grands), et une sous-représentation de l'Ile-de-France (27% de l'échantillon alors que 40% des lots de copropriété y sont situés)...
Pour prouver l'invraisemblance du résultat de 92% de conformité de la deuxième enquête, l'ARC a réalisé une nouvelle enquête sur 2.060 contrats, tous en vigueur en 2009, collectés auprès de ses adhérents, par Internet et par voie de presse, et annoncé que l'échantillon était à la disposition de la DGCCRF, des fédérations de syndics ou des médias qui souhaiteraient le contrôler. L'association affirme que la proposition de contrats était libre et que des syndics en ont proposé spontanément. Et que de toutes façons, 2.000 contrats différents représentaient peut-être le quart de tous les contrats "possibles" en France...
L'échantillon n'est pas exempt de sous-représentations, mais elles sont inverses de celles de celui de la DGCCRF : 32% seulement des contrats émanent des grands groupes, 68% émanent de syndics affilés à une organisation professionnelle (toutes ont adhéré à l'avis du CNC), et 79% des contrats émanent de l'Ile-de-France...
Les contrats retenus comme conformes dans l'analyse étaient ceux n'ayant pas plus de 4 non-conformités ; les autres ont été classés en deux catégories : les contrats en "trompe l'oeil" (5 à 10 tâches devant normalement être dans la gestion courante et tarifées hors horfait), et les autres considérés comme "hors jeu".
Résultat : 50% seulement de contrats conformes au total, et 18% de contrats en "trompe l'oeil" ; mais ces proportions montent à respectivement 67 et 13% chez les grands syndics, et tombent à 43 et 19% chez les petits et moyens. Le score est encore plus catastrophique selon cette analyse chez les syndics non affiliés à une organisation professionnelle, où l'ARC compte plus de 54% de contrats "hors jeu".
Les taux sont bons en Ile-de-France et en province (29 et 21% respectivement de contrats "hors jeu" et 52 et 70% de contrats conformes), et par contre mauvais à Paris intra-muros avec 37% seulement de contrats conformes, ce qui dénote la persistance d'une sociologie spécifique Paris, où les petits cabinets traditionnels sont encore nombreux.
Par ailleurs, l'ARC, rend hommage au travail fait par la FNAIM et l'UNIS qui ont prescrit à leurs adhérents un contrat-type mis au point en commun, mais regrette que seuls 65% de leurs adhérents l'utilisent, et que tous n'appliquent pas exactement l'esprit...
Interpellé, le gouvernement devra tôt ou tard réagir, et commencer peut-être par une initiative permettant de mettre dans un premier temps d'accord les différentes parties prenantes sur les critères permettant de conclure à la conformité ou non d'un contrat, prenant notamment en compte une certaine pondération des non-conformités en fonction d'une échelle d'importance.
A suivre...
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