A compter du 1er mars 2005, une nouvelle institution administrative indépendante sera mise en place pour connaître de toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi.
Composée de 11 membres nommés pour 5 ans, elle pourra demander des explications aux personnes physiques ou morales mises en cause, procéder à des vérifications et, le cas échéant, saisir la Justice.
Les citoyens s'estimant victimes d'une discrimination pourront la saisir dans des conditions qui seront fixées par décret, ou bien via un député, un sénateur ou un député européen. Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre les discriminations ou d'assister les victimes de discrimination, peut saisir la haute autorité conjointement avec toute personne qui s'estime victime de discrimination et avec son accord. La Haute autorité pourra également se saisir d'office des cas de discrimination directe ou indirecte dont elle a connaissance, « sous réserve que la victime, lorsqu'elle est identifiée, ait été avertie et qu'elle ne s'y soit pas opposée ».
Les autorités publiques sont obligées de coopérer. La haute autorité a pour rôle d’assister la victime de discrimination dans la constitution de son dossier, et de l’aider à identifier les procédures adaptées à son cas. Elle est toutefois dotée de pouvoirs d’investigation propres sur habilitation spécifique donnée par le procureur dans des conditions et selon des modalités qui seront fixées par décret. Lorsqu'il apparaît à la haute autorité que les faits portés à sa connaissance sont constitutifs d'un crime ou d'un délit, elle doit en informer le procureur de la République, qui doit en retour l’informer des suites données à ses transmissions…
La haute autorité aura aussi la mission de mener des « actions de communication et d'information propres à assurer la promotion de l'égalité » et favoriser « la mise en oeuvre de programmes de formation ». Elle pourra conduire des travaux d'études et de recherches soutenir les initiatives de tous organismes publics ou privés en ce qui concerne « l'élaboration et l'adoption d'engagements visant à la promotion de l'égalité ». Elle aura la charge d’identifier et promouvoir « toute bonne pratique en matière d'égalité des chances et de traitement » et recommander toute modification législative ou réglementaire. Elle devra être systématiquement consultée par le gouvernement sur toute question relevant de ce domaine, y compris dans la préparation et la définition de la position française dans les négociations internationales dans le domaine de la lutte contre les discriminations…
L’article 19 de la loi créant cette haute autorité transpose également en droit français une directive européenne (2) sur l’égalité des droits : s’appliquant « en matière de protection sociale, de santé, d'avantages sociaux, d'éducation, d'accès aux biens et services, de fournitures de biens et services, d'affiliation et d'engagement dans une organisation syndicale ou professionnelle, y compris d'avantages procurés par elle, ainsi que d'accès à l'emploi, d'emploi et de travail indépendants ou non salariés », elle institue le droit de chacun « à un traitement égal, quelles que soient son origine nationale, son appartenance ou non-appartenance vraie ou supposée à une ethnie ou une race », et met à la charge de la partie à qui il est reproché une discrimination directe ou indirecte en ces domaines de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La loi précise cependant que ce principe ne s’applique que devant les juridictions civiles…
Bien entendu, l’accès au logement, que ce soit par location ou acquisition, sont directement concernés par ces dispositions. Les tribunaux n'ont d'ailleurs pas attendu pour commencer à prononcer désormais des sanctions pénales significatives : par exemple 3.000 euros d'amende pour un propriétaire d'immeuble et une directrice d'agence immobilière pour "discrimination" au logement dénoncée par des enregistrements de SOS Racisme et quatre mois de prison avec sursis et 10.000 euros d'amende pour une propriétaire qui ne voulait pas vendre "à un arabe", dénoncée par un agent immobilier (3)...
(1) loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité
(2) directive n° 2000/43/CE du 29 juin 2000
(3) respectivement Cour d'appel de Toulouse, 3ème Ch., 5 octobre 2004, n° 03/00593 et Tribunal correctionnel Grenoble, 15 septembre 2004
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