En moyenne, sur les 50 plus grandes villes de France, la hausse de taxe foncière a été de 1,12% en 2014 contre 3% en 2013. L'UNPI (Union nationale de la propriété immobilière), qui chaque année s'évertue avec son Observatoire des taxes foncières à dénoncer la "flambée" des impôts locaux, le reconnaît, et en est réduite à afficher la hausse sur une durée de plus en plus longue, à présent sur 5 ans de 2008 à 2013, soit 21,2%, un peu moins de 4% par an. C'est certes nettement plus que l'inflation, l'évolution des loyers et des revenus des ménages, mais en grande partie en raison de l'augmentation générale et uniforme des valeurs locatives votée chaque année par le parlement, et systématiquement supérieure à l'inflation...
Il est cependant une catégorie de contribuables pour qui la taxe foncière va exploser à partir de 2015 : les propriétaires de terrains constructibles non bâtis, en zones tendues. La loi de finances pour 2014 a instauré pour eux une majoration automatique de 25% du montant de la taxe foncière de base, plus une majoration de 5 euros/m². Cette mesure devait s'appliquer en 2014. Les agriculteurs ont obtenu, lors de l'adoption de la loi de finances pour 2014, que les terrains agricoles en soient exonérés. Mais les autres propriétaires doivent se contenter d'un report d'un an. A partir de 2017, la majoration forfaitaire passe de 5 à 10 euros /m2. Le propriétaire d'une parcelle de 1.000 m2 située dans une zone constructible paiera 5.000 euros de majoration forfaitaire, et 10.000 euros à partir de 2017 !
Dans les autres régions, les propriétaires de terrains constructibles ne seront pas nécessairement épargnés, les communes pouvant imposer si elles le souhaitent une hausse d'impôt pouvant atteindre 3 euros le m2. L'objectif est clairement de forcer le propriétaires à vendre leurs terrains en vue de favoriser la construction. Le gouvernement a choisi de manier à la fois le bâton et la carotte : ceux qui vendront rapidement leurs terrains bénéficieront en effet de façon temporaire d'un abattement de 30% sur les plus-values de cessions en 2015.
A l'approche de l'entrée en vigueur - on admirera une fois de plus le manque de mobilisation en temps utile -, cette taxation suscite de très fortes réactions, notamment des maires de petites communes qui n'ont pas forcément de déficit de construction, ou qui considèrent ne pas en avoir en raison de l'hostilité de leurs administrés à l'égard de la densification. Pris à parti par plusieurs d'entre eux, le gouvernement semble prêt à lâcher un peu de lest. Initialement étaient visées les 28 unités urbaines englobant quelque 1.100 communes soumises à la taxe sur les logements vacants. Devant le lobbying de certains élus - notamment de Haute-Savoie à cause de la proximité avec la Suisse -, ce zonage devrait donc être revisité afin d'épargner les communes éloignées des grandes agglomérations. Il faut dire que certains maires ont menacé de refuser de fournir la liste des terrains concernés avant le 1er octobre au fisc.
La ministre du logement, Sylvia Pinel, a également indiqué lors du débat parlementaire qui a commencé sur le budget que "le problème peut résulter de certains documents d'urbanisme trop généreux" dans leur classement des terrains constructibles. Autrement dit, les maires peuvent déclasser les terrains si nécessaire pour qu'ils échappent à cette hausse de la fiscalité foncière, ce qui est plus facile à dire qu'à faire, car il faut modifier les plans locaux d'urbanisme (PLU).
Il reste que les propriétaires qui n'auront pas la chance de voir leur commune échapper au dispositif, ne pourront y échapper qu'à trois conditions : faire exploiter le terrain par un agriculteur, déposer un permis de construire, une autorisation de lotir ou un permis d'aménager, ou tout simplement vendre la parcelle avant le 31 décembre de l'an prochain. Encore faut-ils qu'ils le puissent : de nombreux propriétaires de terrains en zone rurale les verraient bien classés non constructibles, car ils le sont de fait, et deviennent, si eux-mêmes n'ont pas les moyens de construire, invendables avec cette surtaxation !
En tous cas, il n'est pas question de report ou d'annulation de cette mesure, du moins pour le moment : vu le nombre de propriétaires concernés, un mouvement de "bonnets rouges" n'est pas à exclure d'ici quelques mois...
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