En 2010, Bernard Vorms, alors président de l'ANIL, avait remis un rapport résultant des travaux d'une commission constituée au sein du CNIS (Conseil national de l'information statistique), sur l'information statistique sur le logement et la construction, mise en place à l'automne 2009 suite au constat par le nouveau secrétaire d'Etat au logement d'une certaine confusion dans les médias entre les différents chiffres et indices publiés par une multiplicité de sources, et avait pour objectif de formuler des recommandations pour une meilleure transparence du marché du logement au travers notamment de la statistique publique. Il concluait de manière décevante que les seules statistiques fiables étaient celles de notaires et de l'INSEE...
Or les chiffres publiées par les notaires de Paris pour l'Ile-de-France et le Conseil supérieur du notariat pour le reste de la France, repris par l'INSEE au niveau d'indices corrigés des variations saisonnières, sont peu détaillés, peu cohérents entre la région capitale et la "province", comme appellent encore les notaires le reste de la France, et essentiellement basés sur les signatures d'actes authentiques : or non seulement ils ne sont publiés qu'avec 2 à 4 mois de décalage, ils ne reflètent le marché que pour une période floue de 2 à 4 mois encore antérieure, ce qui n'est ni d'une grande précision ni d'une grande fraicheur...
Malheureusement, de nombreux commentateurs citent ces chiffres comme reflétant le marché du moment alors qu'ils caractérisent, et encore de manière peu précise, le marché d'il y a six mois ! Les notaires ont bien commencé à mentionner des "chiffres avancés" établis à partir des promesses de vente (qu'ils établissent eux-mêmes semble-t-il pour 70% des ventes), mais ils sont embryonnaires, et la tâche consistant à les collecter des offices notariaux et à les traiter, engagée déjà depuis 3 ans, semble insurmontable !
Enfin, les notaires mélangent des transactions effectuées sans intermédiaire - qui reflètent le vrai prix du bien - avec des transactions réalisées avec intermédiaire, dont ils retiennent le prix honoraires déduits. Or, dès lors que les honoraires de négociation sont dans l'écrasante majorité des cas ceux de mandats de vente, initialement à la charge du vendeur, le prix de marché est celui honoraires inclus, ce qui introduit une distorsion de 4 à 6%...
Le ministère du logement, avec le CGEDD (Commissariat général de l'environnement et du développement durable) d'après la DGFiP et les bases des notaires, tient le compte du nombre de transactions signées, objet de nombreuses controverses récentes, tous ceux qui citent ses chiffres ne sachant pas toujours ce qu'ils recouvrent exactement : neuf et ancien, transactions sur les terrains, immeubles entiers, locaux annexes tels que caves et parkings vendus séparément, etc.)
A côté, plusieurs données sur le marché établies à partir des promesses de vente sont publiés périodiquement, les unes par une fédération professionnelle d'agents immobiliers (la FNAIM), et les autres par deux réseaux d'agences : Century 21, et Laforêt. Ces sources publient semestriellement - en début de semestre pour le semestre précédent - des chiffres peu concordants qui sèment le trouble chez les commentateurs, comme ceux de VotreArgent.fr pour la livraison de ce début juillet : concernant le volume des ventes, par exemple, alors que Laforêt constate une hausse de 1% entre le premier semestre 2014 et le premier semestre 2013, chez Century 21, on fait plutôt état d'une baisse de 2,8%. A la FNAIM, on ne se base que sur les chiffres issus du notariat. Côté prix sur un an, on relève -2,5% chez Laforêt, -0,4% chez Century 21 et -1,9% à la FNAIM.
Ces différences son dues à la source et au traitement des informations. Century 21 et Laforêt sont des réseaux de franchise. Les franchiseurs qui publient les chiffres imposent à leurs adhérents des remontées d'informations sur les transactions réalisées qui servent à l'établissement de la redevance et aux analyses internes. Ces entreprises peuvent effectuer un traitement exhaustif des transactions réalisées et publier des chiffres "frais". Par contre, la représentativité de ces chiffres est fonction du nombre d'agences et de leur localisation. Ainsi, on peut accorder un peu plus de crédit à ceux des quelques 800 agences Century 21 réparties dans toute la France qu'à ceux de Laforêt, moins nombreuses, réparties différemment et réalisant deux fois moins de transactions...
Quant à la FNAIM, un grand doute pèse depuis plusieurs années, non pas sur les traitements statistiques sur la sophistication desquels elle a beaucoup communiqué - la FNAIM serait la seule avec l'INSEE à établir des indices "hédoniques", c'est à dire à nature de biens constante, alors que les autres se contentent d'établir des moyennes sur des prix bruts - mais sur la collecte des données sur les transactions en provenance des agences adhérentes, sur laquelle elle est plus discrète... Elle a cependant à diverses reprises montré que l'évolution de ses indices épousaient sur la durée celle des indices des notaires et de l'INSEE.
A quand une vraie mobilisation des informations disponibles et une harmonisation sous le contrôle d'une autorité statistique indépendante, ou du moins comme avec CLAMEUR pour les loyers, une collecte très large sous une autorité scientifique crédible ? Il faudrait pour cela que cessent les querelles de chapelle - la FNAIM fait "bande à part depuis des années, même pour CLAMEUR - et la priorité donnée par les réseaux de franchise à l'exploitation promotionnelle de leurs données !
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