La ministre en charge du logement, Cécile Duflot, ne s'est pas rendue les mains vides à la journée de présentation du 19ème rapport sur le "Mal-logement" de la Fondation Abbé Pierre le 31 janvier : en plus de la disposition - connue - du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové ("ALUR"), que les sénateurs finissaient de voter le même jour en 2ème lecture, rétablissant le bénéfice de la trêve hivernale des expulsions pour tous, y compris les "occupants sans droit ni titre" (en clair les "squatters"), à l'origine prévu dans la loi de 1956 et supprimée en 1991, elle a également annoncé le lancement d'une mission nationale confiée à la société Adoma pour résorber les bidonvilles.
Anciennement Sonacotra, Adoma est une société d'économie mixte française dont le capital est détenu par des acteurs publics (État, SNI, etc.). L'entreprise construit et gère des foyers de travailleurs migrants, des résidences sociales, des "pensions de famille", des centres d'hébergement, des centres d'accueil de demandeurs d'asile, et même des aires d'accueil de gens du voyage. Elle loge et héberge plus de 70.000 personnes. La Sonacotra avait été le fer de lance de la résorption des bidonvilles de la région parisienne dans les années 60-70, tels que celui célèbre de Nanterre. Aujourd'hui sont concernés notamment les camps de Roms.
Dans le cadre d'une intervention en ingénierie sociale, Adoma sera missionnée pour coordonner l'action des acteurs locaux (services de l'État, collectivités, associations) en matière de réalisation ou d'actualisation de diagnostics sociaux, et si nécessaire, mobiliser les solutions d'hébergement de droit commun, au-delà de son propre parc immobilier : foyers de travailleurs migrants en zones détendues, centres d'hébergement et d'insertion via les SIAO, logements familiaux dans le diffus, patrimoines de l'État, des collectivités locales, des hôpitaux publics, des comités d'entreprise, de la Poste, de la SNCF, de RFF ; fonciers publics disponibles pour la construction de logements modulaires préfabriqués, places en hôtels pour faire face à des situations d'urgence.
Adoma sera aussi chargée d'assurer l'accès effectif au droit commun - couverture santé, prévention et soins (PMI, vaccinations, permanence des soins de santé), aides sociales, aide alimentaire, aide vestimentaire, scolarisation des enfants, etc. - et proposer un accompagnement personnalisé aux familles : mobilisation des dispositifs d'insertion existant, actions favorisant l'insertion professionnelle des adultes et des jeunes majeurs, opérations de relogement, recours aux dispositifs d'accompagnement et d'aide à la réinsertion dans le cadre d'un projet de retour, etc. Les préfets pourront aussi, au besoin, mobiliser Adoma pour une intervention en tant qu'opérateur de logement très social.
A noter qu'Adoma (ex Sonacotra) est au coeur d'un bras de fer entre l'actuelle équipe de Cécile Duflot et la direction de la SNI, filiale de la Caisse des dépôts et premier bailleur social en France, qui avait été appelée à entrer dans son capital en 2011 à un moment où la Sonacotra était en difficulté. Elle aimerait bien consolider son investissement et racheter le reste du capital, ce que refuse le ministère, qui veut que l'Etat garde un contrôle direct sur Adoma...
Plus qu'accessoirement, la ministre a aussi annoncé que l'année 2014 sera aussi celle de la réalisation d'un véritable "plan d'action" en faveur des personnes reconnues prioritaires au regard du DALO (Droit au logement opposable), en souffrance actuellement. Quelque 57.000 familles se sont vu attribuer le statut prioritaire à la loi du logement opposable, mais "quand on est prioritaire DALO et que l'on attend trois ou quatre ans, la loi perd tout son sens", a assuré la ministre devant les 2.000 participants à la journée de la Fondation Abbé Pierre.
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