C'est ce qui ressort des chiffres à août 2013 de l'observatoire CLAMEUR (Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux), opéré par le professeur Michel Mouillart de l'université Paris X, et qui voit le nombre de ses contributeurs augmenter au point de prendre en compte à présent près d'un bail sur six signés en France. Les animateurs de l'observatoire, présidé actuellement par le président de Foncia, assisté des présidents de deux des trois grandes fédérations d'agents immobilier et administrateurs de biens, l'UNIS et le SNPI - la FNAIM a toujours refusé d'en faire partie - ambitionnent ouvertement d'en faire la référence en matière d'observation des loyers sur les marchés urbains de la métropole, selon un maillage de près de 3.000 marchés locaux, et de l'ouvrir courant 2014 au grand public, en concurrence frontale avec les observatoires que met en place le gouvernement pour la connaissance des marchés et l'encadrement des loyers !
Les loyers à fin août n'étaient en moyenne en augmentation que de 0,1% en rythme annuel, sur un marché dont la mobilité est presque à un plus bas historique : 26,3% alors qu'elle est de 30% dans les périodes de forte activité. Depuis 2011, l’offre locative privée nouvelle (présentée chaque année sur le marché) s’est contractée de 90.000 unités, alors que la construction locative privée (75.000 en 2011 et moins de 45.000 en 2013) a fortement diminué depuis deux ans. Le marché est visiblement bloqué, les délais de relocation s'allongent et la vacance augmente, mettant en évidence une réticence à bouger chez les locataires - une étude récente Ipsos/ORPI montre que 78% des locataires n'ont pas les moyens d'acheter leur logement et 45% disposent de moins de 1.000 euros d'apport personnel -, mais aussi une inadéquation croissante entre l'offre et la demande.
L'effort d'amélioration-entretien lors des relocations se maintient à niveau, au dessus de la moyenne décennale, ce qui contribue à soutenir les loyers qui autrement baisseraient. Sans travaux, le différentiel de loyers entre locataires entrant et sortant est en effet de -3,2% en moyenne (et même jusqu'à -9,5% à Bordeaux !), alors qu'il est de +8,6% avec de gros travaux (jusqu'à +23,2% à Paris !)...
Ce sont les petits logements qui tirent vers le bas (-0,5% pour les 2 pièces et moins), alors que les 4 et 5 pièces continuent à augmenter plus que de l'inflation (+1,3 et +1,7%). Les loyers baissent globalement dans 38,5% des villes de plus de 100.000 hab. (dont Bordeaux, Montpellier, Nice, Paris) et dans 30,8% ils augmentent moins vite que l'inflation (dont Angers, Grenoble, Marseille, Nantes, Saint Etienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse)...
Reste à savoir l'effet qu'aura l'encadrement des loyers voté en 1ère lecture par les députés dans le projet de loi "Duflot" pour l’accès au logement et un urbanisme rénové ("ALUR"). Les propriétaires et les professionnels dénoncent le risque - réel - que les logements de qualité, à loyer au m2 cher, sortent du marché locatif et soient mis en vente, ce qui au passage peut faire baisser un peu leur prix et les rendre plus accessibles aux accédants à la propriété... De bonne guerre, ils agitent aussi l'idée que l'encadrement, tel que prévu, puisse se traduire par une augmentation des loyers les plus bas, au détriment des locataires les plus modestes. Ce risque est en fait plus hypothétique, car il y a longtemps que les propriétaires ont la possibilité de réévaluer les loyers manifestement sous-évalués et que l'essentiel a été fait. Il est peu probable que la plus grande facilité qui leur sera offerte soit davantage mise à profit, alors que les biens meilleur marché se heurtent à la solvabilité réduite des locataires modestes, touchés de plein fouet par la hausse du chômage, l'augmentation de la précarité - près de 85% des embauches actuelles sont en CDD, un record jamais atteint ! - et la baisse du pouvoir d'achat...
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