Le principal dispositif de la loi "Brottes", adoptée définitivement le 11 mars après un parcours parlementaire chaotique, créant une progressivité de la tarification du gaz et de l'électricité pour les résidences principales - un "bonus-malus" -, a été retoquée par le Conseil constitutionnel. Il faut dire que sa validation était tout sauf acquise... Le gouvernement se trouve ainsi ramené à la case départ, au grand soulagement de tous ceux qui, dans le milieu des fournisseurs d'énergie comme chez les professionnels de la gestion immobilière et les associations de locataires et de copropriétaires, redoutaient la complexité de l' "usine à gaz" prévue.
Le Conseil constitutionnel a reproché au texte de prévoir une répartition collective du bonus-malus dans les immeubles collectifs pourvus de chauffage, mais dépourvus de répartiteurs de frais de chauffage permettant d'individualiser les charges d'énergie. Une telle répartition du bonus-malus n'est pas cohérente avec l'objectif de responsabiliser chaque consommateur domestique au regard de sa consommation d'énergie de réseau, et n'assure pas le "respect de l'égalité devant les charges publiques, d'une part, entre les consommateurs qui résident dans ces immeubles collectifs et, d'autre part, avec les consommateurs domestiques demeurant dans un site de consommation résidentiel individuel" ; en d'autres termes, un résidant économe ne bénéficierait pas de ses efforts si les autres résidants ne sont pas vertueux...
Autre grief : le bonus-malus ne s'applique qu'aux particuliers et pas aux entreprises, et au secteur résidentiel et pas à l'immobilier tertiaire, ce qui méconnait aussi l'égalité devant les charges publiques. Par contre, le Conseil constitutionnel a écarté la critique formulée par les parlementaires qui l'ont saisi, relative au fait que la loi excluait du dispositif le fioul, au profit du gaz, de l'électricité et de la chaleur de réseau.
Prenant acte de cette censure, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, Delphine Batho, s'est dite déçue, mais a aussi souligné que le Conseil "n'a pas censuré le bonus-malus dans son principe mais en raison de son périmètre d'application". Elle déclare "ne pas renoncer à une tarification vertueuse et responsable de l'énergie", laquelle trouvera place, à travers "une solution juridiquement solide", dans le projet de loi de programmation sur la transition énergétique qu'elle doit présenter en septembre.
Quant au rédacteur et rapporteur du texte, François Brottes, il voit quant à lui dans cette décision "un encouragement à trouver une solution qui incite réellement le plus grand nombre aux économies d'énergie"...
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