Alors que la réglementation thermique 2012 entre en vigueur dans quelques mois pour les maisons individuelles (1er janvier 2013), l'outil de calcul ne cesse d'être modifié, avec des résultats qui diffèrent d'une version à l'autre. L'objectif est de présenter un calcul thermique de la consommation d'énergie primaire inférieur à 50 kWh/m².an. Un chiffre qui repose sur trois coefficients – besoin bioclimatique (Bbio), consommation conventionnelle d'énergie primaire (Cep) et température intérieure de consigne (Tic) – calculés à l'aide d'un outil informatique développé par le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment). Problème : depuis la publication de la méthode de 1.400 pages à l'été 2011, six versions du moteur ont été élaborées puis testées par un groupe de travail d' "applicateurs", et une nouvelle version est annoncée avant l'été , dénonce le cabinet d'ingénieurs thermiciens Pouget Consultants et membre de ce groupe.
"Nous ne sommes pas hostiles à la RT. Mais je ne sais pas à quel prix je vais devoir vendre ces maisons : entre septembre et février, les exigences de consommation calculée par le moteur se sont renforcées de près de 20 %" explique Patrick Vandromme, président de Maisons France Confort, dans des propos rapportés par Le Moniteur. Les constructeurs de maisons individuelles s'engagent en effet via un contrat de construction avec prix ferme et descriptif technique contraignant. Difficile aussi de préparer la commercialisation (études, catalogues, descriptifs…) et d'optimiser les prix de ces maisons qu'ils vendront dès l'été.
Un des problèmes posés par la dernière version du moteur : la disparition annoncée de l'effet joule. Une maison de 90 m² chauffée à l'électricité en région Rhône-Alpes a ainsi vu sa consommation baisser de 7 kWh/m²/an entre les versions de juin et septembre 2011 puis gagner 10 kWh en février. "Cette version ne nous permet plus d'utiliser l'effet joule, qui était pourtant pertinent pour une grande partie du pays compte tenu de la faiblesse des consommations", regrette Patrick Vandromme auprès du Moniteur. Le surcoût est estimé entre 5.000 et 6.000 euros pour passer de 70% des maisons dotées d'un chauffage électrique à 100 % d'équipements complexes à mettre en œuvre (boucle à eau chaude, bois, etc.).
Les contraintes de la performance énergétique changent aussi le métier de constructeur de maisons individuelles (CMI) : "hier, le CMI maîtrisait le bâti puis adaptait les équipements. Demain, ce sera l'inverse. Que maîtrisera-t-il en changeant de métier si brutalement ?", s'interroge un spécialiste du groupe EDF.
Devant cette situation, l'Union des maisons françaises (UMF) a réclamé les mêmes dérogations que le logement collectif. Le ministère a mis moins d'un mois pour trancher et opposer une fin de non recevoir. L'UMF avait demandé au gouvernement de porter le "Cep max" à 57,5 KWh/m²/an et ce, jusqu'au 31 décembre 2014 en cohérence à la dérogation déjà acceptée pour le logement collectif. Il est vrai que si le ministre avait accepté, la RT 2012, qui impose un "Cep Max" de 50 KWh/m²/an à partir du 1er janvier 2013 aurait pris du plomb dans l'aile.
"Les simulations réalisées lors de l'élaboration de la réglementation ont en effet montré que le passage d'une exigence règlementaire en Cep max de 57,5 à 50 KwhEP/(m².an) dans les immeubles collectifs nécessitait l'introduction de nouvelles technologies qui sont encore coûteuses car insuffisamment diffusées sur le marché de la construction, et moins mâtures", a indiqué Benoist Apparu dans sa réponse à l'UMF. A contrario, cet effet de seuil n'existe pas pour les maisons individuelles, selon le ministère, "l'exigence pouvant être atteinte sans changement radical de technologies, mais uniquement grâce à une légère augmentation des performances énergétiques des matériaux déjà installés". Benoist Apparu rappelle que les premières versions du moteur de calcul ont été mises très tôt à disposition des professionnels pour qu'ils puissent s'y préparer et que les écarts les variations de Cep obtenues entre les différents moteurs de calculs sont inférieurs à 5%. "Au vu de ces éléments, il ne m'apparaît pas nécessaire de revoir les objectifs définis et partagés en 2010", conclut le ministre...
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