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Un économiste contre le Tous propriétaires
29/1/2011
"Tous propriétaires? C'est une illusion !" clame l'économiste Pierre-Laurent Petit, président des Cahiers verts de l'économie, ancien directeur de la recherche économique et stratégique d'Exane-BNP Paribas, dans une chronique dans le Journal du Dimanche (1) : la pierre n'est pas une valeur refuge et le sur-investissement dans l'immobilier présente de nombreux risques.
"Les politiques d'accession tous azimuts à la propriété n'ont pas de justification sociale et économique. Les conditions de logement ne s'améliorent pas en fonction du nombre de propriétaires. L'Allemagne, la Suède ou la Suisse ont une proportion plus forte de locataires que la France. Leurs habitants vivent pourtant dans de très bonnes conditions", fait-il remarquer.
Par contre, dénonce-t-il, ces politiques sont aussi inefficaces car elles accentuent la hausse des prix. "Les acheteurs perdent donc au niveau des tarifs, ce qu'ils gagnent avec les incitations publiques. On aboutit à une détérioration des finances de l'Etat. Et on amplifie la bulle immobilière. Pis, ces mesures sont très inégalitaires. Elles pénalisent les jeunes primo-accédants au bénéfice des seniors qui vendent leur bien. Quant aux locataires, la part de leur budget consacrée au logement est passée de 19% en 1984 à 25% en 2005".
Comme vient de le rappeler l'OCDE, il constate aussi qu'un taux élevé de propriétaires tend à réduire la mobilité des ménages. Pire: le sur-investissement dans l'immobilier détourne des ressources nécessaires à l'investissement productif, à l'innovation et à la croissance future. sans compter qu' "une société de propriétaires est beaucoup plus sur défensive", comme il le fait remarquer. L'immobilier est peu liquide et difficilement divisible, ce qui est gênant quand "les cycles de vie des gens sont plus heurtés qu'auparavant en raison des changements d'emploi, des divorces", etc. Sans compter que le patrimoine des Français est trop peu diversifié : 60% est constitué par l'immobilier contre moins de 30% aux Etats-Unis.
"Tous propriétaires, c'est un objectif politique", conclut-il. "Il s'agit de calmer les peurs des Français sur le financement des retraites et de camoufler la quasi-stagnation des revenus réels. C'est une illusion patrimoniale politiquement payante. Elle s'appuie sur le mythe de la pierre comme actif refuge". "Demandez aux Américains et aux Irlandais si l'immobilier est stable", suggère-t-il. Pour les économistes, les actifs "refuges" n'existent pas. Pas plus l'immobilier que l'or ou les obligations d'Etat.
S'il ne prévoit pas d'explosion brutale et prochaine d'une bulle immobilière "sauf krach obligataire durable" - il prévoit que les prix pourraient même encore progresser si la durée des prêts s'allonge à nouveau -, il pense que la valeur réelle du patrimoine immobilier risque de décliner au cours des prochaines années en raison des faibles perspectives de revenus, des probables mesures de libéralisation du foncier disponible, des coûts liés à l'adaptation aux normes environnementales et de l'éventuelle hausse de la taxation foncière. En outre, il pense comme la plupart des observateurs que l'essentiel de la baisse des taux est derrière nous.
(1) Le Journal du Dimanche - Samedi 22 Janvier 2011