Puisqu'en ces temps difficiles la tendance est de minimiser les coûts en les ramenant à des durées plus courtes, pourquoi s'arrêter en chemin ? La maison à 15 euros par jour, lancée en grande pompe - conférence de presse, site Internet (1), etc. - par la ministre du logement et de la ville, paraîtrait-elle encore trop chère si on mentionnait son coût de remboursement mensuel, seule vraie référence pour les acquéreurs potentiels, de 450 euros par mois ? Encore faut-il savoir comment on y arrive et ce que le "produit" comporte exactement ! Là encore, pourquoi avancer masqués : la modicité des remboursements est obtenue certes par le bénéfice d'une TVA à 5,5% (seul véritable avantage fiscal car notre ministre n'a pas obtenu un supplément d'exonération de taxe foncière au delà de l'exonération normale pour une maison neuve), un prêt PAS ouvrant droit à l'APL, et l'inclusion dans le financement d'un prêt à taux zéro majoré, mais aussi par un artifice : le "Pass-foncier", système qui permet de n'acheter dans un premier temps que la maison, le terrain étant acheté et "porté", le temps de rembourser celle-ci, soit sur une durée de 18 à 25 ans, par un organisme collecteur du 1% logement, qui le revend à la fin de cette période, avec un financement supplémentaire de 10 à 15 ans. Soit en fin de compte un financement de 35 à 40 ans...
Au prix bien entendu d'un montage juridique redoutable, en principe le bail à construction, dont on se demande pour le moment comment il prendra en compte l'éventualité que les heureux bénéficiaires aient un jour l'idée saugrenue de revendre pour faire preuve de mobilité : le rachat par l'organisme "porteur" du terrain sera-il contractuel, et dans quelles conditions ? A défaut, un acquéreur pourra-t-il reprendre l'opération là où elle en sera arrivée, y aura-t-il un "marché" pour ce type d'opérations en cours, autant de questions à ce jour sans réponses !
Il y a aussi la question du terrain : l'acquéreur devra nécessairement s'adresser à un organisme partenaire, et les terrains sont ceux sur lesquels au moins une collectivité locale attribue une aide à l’accession sociale à la propriété. Reste à savoir où ces terrains seront proposés, s'ils le seront dans les secteurs à forte pénurie de logements accessibles, et si l'économie réalisée par les acquéreurs sur leurs remboursements ne sera pas annulée par des coûts de transport majorés (sans parler de développement durable).
En fait, tout cela aurait pu se faire avec des financements aidés de 35 à 40 ans : le résultat pour les acquéreurs eut été le même, mais c'eût été trop simple ! Rendons-nous donc à l'évidence : être tendance, c'est faire usine à gaz ! Place donc à la créativité - et à l'opacité qui va avec -, celles de notre administration prouvant une fois de plus qu'elle n'a rien à envier à celle des financiers, et de leurs montages malins, compréhensibles des seuls initiés...
Peut-être est-ce aussi un moyen de faire que le mouvement du 1% place rapidement des liquidités qu'il semble avoir en grandes quantités, et les mettre ainsi à l'abri des convoitises qui s'expriment ici ou là !
(1) site Internet : proprietairedemamaisonpour15eurosparjour.fr
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