Rappel : le Forum d’Universimmo a migré sur cette nouvelle plate-forme en 2009.
Le forum ancienne version (36545 membres, 65355 sujets et 524136 messages) reste accessible ici
             
 
  Abonnez-vous Ă  nos flux RSS. Les flux RSS permettent d’être informĂ© automatiquement des dernières publications du Forum UniversImmo
Universimmo.com
Identifiant:
Mot de passe: Se souvenir de moi?
Mot de passe oublié?

 SĂ©lectionnez un thème:
 
Accueil | Portail | S’enregistrer | Sujets actifs | Recherche | FAQ  
Sondages actifs | Sujets sans réponse | Règles du forum

 Tous les forums
 Urbanisme et voisinage
 Droits de l'urbanisme et du voisinage
 Scjmilibluzcasstet.....les chemins indivis
Imprimer le sujet Imprimer le sujet
Partager ce sujet Partager ce sujet
  Ce sujet est en lecture seule, AUCUN ENVOI autorisĂ©  
Auteur
Sujet prĂ©cĂ©dent Sujet Sujet suivant  

Jean-Michel Lugherini
Pilier de forums

France
3388 message(s)
Statut: Jean-Michel Lugherini est déconnecté

PostĂ© - 05 dĂ©c. 2010 :  07:05:20  Lien direct vers ce sujet  Voir le profil
Un glaçon! Un alka selzer ! et beaucoup de révisions......

http://crfpa.pre-barreau.com/e-lear...al/corrige-6

Plus sérieusement , ce thème a été abordé plusieurs fois......et donc les difficultés des chemins indivis...........!!!!
Une ligne dans un acte.........des tonnes de papiers pour les experts et les juges ensuite....


citation:
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
LE PRE-BARREAU
FORMATION SEMESTRIELLE
Droit patrimonial
Correction épreuve n° 6
Correction de Monsieur Romain BOFFA
Sujet n° 1 : Cas pratique
Analyse générale de la situation :
A titre liminaire (hors barème)
Le statut du chemin et la perspective de le rendre carrossable.
L’acquisition du fonds B s’est, de toute évidence, accompagnée de la cession de la part indivise du chemin dévolue à
Jean après le décès de son père Benoît. Le débat relatif à la nécessité de modifier le chemin du nord pour le rendre
carrossable semble bien en effet un débat entre propriétaires indivis. Cette cession d’une part indivise est parfaitement
possible puisque sur sa part l’indivisaire (Jean, puis son épouse, en l’occurrence) a des droits de propriétaire classique (en
l’absence de mention de tout exercice du droit de préemption sur le chemin par les autres indivisaires, il doit être exclu).
De fait, parce que l’indivision fonctionne en général selon la règle de l’unanimité sauf exceptions, il faudrait que
M. Cachecash donne son accord pour que des travaux soient entrepris sur ce chemin. Serait-il possible de passer outre le
désaccord d’un des indivisaires afin d’engager les travaux pour rendre le chemin carrossable ? C’est loin d’être évident,
même si la réforme du 23 juin 2006, applicable en l’espèce, a introduit la majorité des 2/3 pour les actes
d’administration, ce qui pourrait ici se défendre.
Mais en tout état de cause, cette question est prématurée car l’accord des indivisaires ne ferait pas de ce chemin un
chemin carrossable : de toute évidence, une voiture ne pourrait pas passer sur le chemin de la largeur qui est
actuellement la sienne puisque Mathieu envisage de céder une partie de son terrain pour rendre le chemin carrossable.
Serait-il possible d’obliger M. Cachecash à céder une partie de sa propriété au profit ou bien des propriétaires indivis du
chemin (dont il est), ou bien de son voisin Mathieu ? Une cession forcée, qui serait une hypothèse d’expropriation pour
cause d’utilité privée, ne semble pas envisageable (car contraire à l’article 545 du Code civil). En revanche, on peut se
demander si Mathieu comme propriétaire du fonds A ne bénéficierait pas d’une servitude de passage à la charge des
parcelles B et C sur les parties de ces parcelles qui permettraient d’agrandir le chemin. La loi prévoit des servitudes de
passage (art. 682 du Code civil). Il faut qu’existe un état d’enclave c’est à dire que le fond n’ait sur la voie publique
aucune issue. Une issue insuffisante pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de la propriété peut
constituer un état d’enclave, mais ici aucune de ces hypothèses n’est concernée. Il n’est donc pas certain que l’on puisse
parler d’enclave dans une telle hypothèse, encore que la jurisprudence la plus récente semble admettre qu’un passage
insuffisant est susceptible de constituer une situation d’enclave même en l’absence de toute activité économique sur le
fonds en question (v. Cass. 3e civ., 24 novembre 2004). Si la qualification d’enclave était adoptée, il serait possible de
demander l’élargissement du chemin en imposant une servitude de passage sur le fonds de M. Cachecash dans la
mesure oĂą la loi indique que la servitude de passage doit permettre un usage normal du fonds et oĂą la jurisprudence a eu
l’occasion de décider que l’utilisation normale du fonds peut impliquer le passage d’un véhicule automobile : en ce sens
v., concernant des maisons d’habitation : Cass. 3e civ. 28 octobre 1974 Bull. III n° 387 ; Cass. 3e civ. 19 mai 1993 (la Cour
d’appel « qui a relevé que l’accès, avec une voiture automobile, correspondait à l’usage normal d’un fonds destiné à
l’habitation, a légalement justifié sa décision en fixant souverainement l’assiette du passage en fonction des besoins
actuels de la desserte du fonds enclavé »).
Faute d’un état d’enclave total, il est possible que les moyens de droit ne permettent pas de passer outre l’absence
d’accord de M. Cachecsah pour rendre carrossable le chemin, encore que la réponse ne soit pas certaine. Dans le doute,
la question se pose donc de savoir si les enfants de Benoît Pacache disposent de moyens de « chantage » contre le
propriétaire de la parcelle qui sépare leurs propres parcelles. Pour y répondre, il faut analyser les rapports des diverses
parcelles entre elles.
Les rapports des diverses parcelles entre elles
Il faut raisonner parcelle par parcelle.
La parcelle A ne bénéficie pour l’instant d’aucun service sur une autre parcelle. Se pose la question de savoir si elle
supporte des servitudes. En particulier se pose la question de savoir
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
si on doit qualifier de servitude le passage de l’étable au cours d’eau : y a-t-il eu une servitude ? peut on désormais parler
de servitude ?
si les vues de la maison sise sur la parcelle B peuvent grever la parcelle A. Pourrait-on exiger la suppression des
fenĂŞtres ?
si on pourrait qualifier de servitude subie par le fonds A le branchement de la maison sur le tuyau d’évacuation.
La parcelle B ne fournit qu’un seul service au fonds C : le passage sur la parcelle du tuyau d’évacuation des eaux usées
provenant de la parcelle C. En revanche, elle bénéficie de nombreux services :
- une vue directe sur le fonds A ;
- un passage de l’étable du fonds B à la rivière A, qu’emploient les locataires du fonds B ;
- un puisage par une pompe mécanique du fonds B sur le fonds C.
Le fonds C n’offre qu’un seul service, l’accès au puits du fonds B ou désormais le puisage par une pompe mécanique. Il ne
demande aux fonds voisins qu’un seul service : le passage du tuyau d’évacuation des eaux usées.
1ère question : Comment qualifier le passage de l’étable du fonds B au cours d’eau par le fonds A ?
Avant la division du fonds, les bĂŞtes descendaient en longeant le chemin qui jouxte la parcelle des voisins, les Pacache.
Puis le fonds a été divisé.
L’hypothèse ne parait pas relever des servitudes de passage prévues par la loi dans la mesure où le fonds B ne peut pas
être dit enclavé puisqu’il est desservi par un chemin, le chemin du nord, qui ne semble pas insuffisant pour le passage
des vaches.
Peut-il y avoir eu une acquisition de la servitude par prescription ?
La prescription est un mode d’acquisition de certaines servitudes seulement : les servitudes continues et apparentes
(art. 690 et 691 C. civ.). Sont continues les servitudes dont l’usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait
actuel de l’homme (art. 687 C. civ.). Donc les servitudes de passage ne sont pas continues, si bien qu’il ne saurait être
question d’une acquisition par prescription.
Toutefois, la jurisprudence a contourné cette difficulté en estimant que si la servitude ne pouvait pas être acquise par
prescription, la propriété de la bande de terrain qui sert d’assiette à l’exercice de la prescription est susceptible d’une
acquisition par prescription. Simplement, pour permettre de prescrire, la possession doit ĂŞtre utile et en particulier ĂŞtre
dépourvue de toute équivoque. Or, que le passage sur le fonds A soit la propriété du propriétaire de la parcelle B est
extrêmement équivoque, indiscutablement : rien dans l’énoncé ne permet de laisser entendre que les tiers pourraient
croire que ce passage n’est pas une partie de la parcelle A.
C’est pourquoi on peut conclure que la prescription n’a pu avoir aucune incidence sur les droits de passage des
propriétaires du fonds B sur le fonds A.
En revanche, l’hypothèse est proche de celle d’une servitude par destination du père de famille (art. 693 C. civ.), puisque
les diverses parcelles proviennent de la division d’un fonds initial unique.
Existe-t-il en l’occurrence une servitude par destination père de famille ? Ne peuvent être constitués par destination du
père de famille que les servitudes apparentes (art. 692 et 694 du Code civil). Or ne sont généralement pas considérées
comme apparentes les servitudes de passage : v. Cass. 3e civ. 4 janvier 1984. Si cette solution était certaine, il ne serait
pas utile d’aller beaucoup plus avant sur cette voie : il ne saurait dans une telle hypothèse y avoir de servitude par
destination du père de famille. Toutefois, il faut relever que la question du caractère apparent ou non d’une servitude
n’est en fait pas lié à sa nature : c’est une question de fait. Des signes extérieurs de servitude peuvent suffire, même s’il
ne s’agit pas d’ouvrages. Une servitude de passage peut être jugée apparente dès lors qu’elle se manifeste par un
chemin ou une porte … Or en l’espèce, il existe un chemin, si bien que l’on pourrait juger la servitude apparente, de sorte
que la question de la servitude par destination du père de famille pourrait se poser. Toutefois, il n’est pas certain qu’un
détour de ce type soit absolument nécessaire.
Plus simplement, on doit se demander s’il n’y aurait pas en l’espèce une hypothèse de servitude constituée par un titre.
Par le testament, le « père de famille » a procédé non seulement à la division des fonds mais a explicitement prévu que
l’un de ces fonds serait grevé d’une servitude au profit de l’autre. Or on peut constituer une servitude par un acte
unilatéral en particulier par un testament. Ce testament doit émaner du propriétaire des fonds (art. 686 du Code civil),
ce qui est bien le cas en l’espèce. Le testament est par ailleurs dépourvu de toute équivoque.
Mais cet acte pour être opposable aux tiers devrait avoir fait l’objet d’une publicité. Rien n’est indiqué en ce sens. Le fils
de Benoît Pacache ne peut toutefois peut-être pas être qualifié de tiers, dans la mesure où il est le continuateur de la
personne de celui qui a constitué la servitude.
Sous cette réserve probatoire, le propriétaire actuel pourrait certainement se prévaloir d’une servitude. Simplement, il
faut se demander si la servitude existe toujours. En effet, l’existence de la servitude est conditionnée par le maintien de
son utilité. Cela signifie principalement qu’une servitude dont l’exercice est devenu impossible doit disparaître (art. 703
du Code civil). Mais cela signifie aussi que lorsqu’une servitude a été créée à une fin particulière dont fait foi le titre
constitutif, elle prend fin lorsque cette utilité particulière disparaît. En l’occurrence, l’acte constitutif de la servitude
indique que celle-ci doit se maintenir « du moins tant qu’il y aura des vaches ». Cette formule doit légitimement être
interprétée – mais, sous réserve du contrôle de la dénaturation, cette interprétation relève de l’appréciation souveraine
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
des juges du fond – comme signifiant la destination strictement agricole de cette servitude. Or, avec la vente des vaches
et l’abandon de toute exploitation agricole au profit d’une activité d’hôtellerie, la servitude a perdu sa raison d’être : elle
doit donc disparaître ! En ce sens, v. Cass. 3e civ. 9 juillet 2003, doc. 10. Le titre qui a établi la servitude en fixait la
mesure, lui conférait une destination particulière : cette destination ayant été abandonnée, la servitude n’a plus de
raison d’être.
Il faut donc convenir que la servitude de passage a disparu. Mathieu pourrait donc légitimement empêcher l’accès de M.
Cachecash à la rivière dans le cadre d’une action négatoire : celui-ci ne bénéficie en effet que d’une simple tolérance au
sens de l’article 2232 du Code civil.
2eme question : comment analyser l’installation d’un tuyau d’écoulement des eaux usées sur les deux fonds ?
L’installation du tuyau d’évacuation des eaux usées date de l’époque où les trois parcelles n’en faisaient qu’une. On peut
donc se demander, puisque l’on est en présence d’un fait ancien, s’il y a eu prescription ; on peut aussi se demander si, eu
égard à l’existence d’un propriétaire commun aux trois parcelles, on ne se trouverait pas dans une hypothèse de
servitude constituée par destination du père de famille.
La constitution de la servitude par prescription
On est en présence d’une servitude apparente : le tuyau longe les trois parcelles. Il y a bien manifestation de la servitude
par des ouvrages extérieurs. Pour que l’acquisition par prescription soit possible, il faudrait que, par ailleurs, cette
servitude soit continue. La question est discutée. La jurisprudence semble toutefois pencher en faveur d’une
qualification de servitude discontinue. En ce sens, v. Cass. 3e civ. 8 décembre 2004, doc. 3. « La servitude d’égout […]
peut être discontinue quand il s’agit de l’égout des eaux ménagères qui suppose l’intervention de l’homme qui les verse,
bien qu’elle s’exerce par des canalisations permanentes » (Traité de droit civil, Les biens, par Jean-Louis BERGEL, Marc
BRUSCHI et Sylvie CIMAMONTI, n° 332, p. 335).Il est donc douteux que l’on puisse admettre qu’il y a en l’occurrence une
servitude continue, si bien que l’acquisition par prescription ne semble pas possible.
La constitution de la servitude par destination du père de famille
Comme la servitude est apparente, qu’elle se manifeste par un ouvrage extérieur, se pose la question d’une éventuelle
qualification de servitude par destination du père de famille.
Deux conditions :
Un fait volontaire : il faut qu’un propriétaire aménage un état de servitude entre diverses parties d’un immeuble lui
appartenant. Tel est bien le cas en l’espèce. Benoît Pacache a bien crée un état de servitude en faisant courir tout au
long de son terrain un tuyau d’évacuation des eaux usées. Si les diverses parties du terrain avaient appartenu à des
propriétaires différents, on se serait bien trouvé dans une situation de servitude.
Un accord tacite : le maintien volontaire de l’aménagement existant lors de la division des fonds. Il faut qu’à l’occasion
de la division du fonds, les diverses parties du terrain entre lesquelles s’était noué un rapport de servitude soient
attribuées à des propriétaires différents et que l’aménagement se perpétue par accord tacite des nouveaux
propriétaires. L’acte à l’occasion duquel les fonds ont été séparés ne doit pas établir la volonté de ne pas créer de
servitude entre les diverses parties. En l’espèce, l’acte qui emporte scission du terrain, le testament, ne s’oppose pas à la
perpétuation de la servitude. Concernant l’évacuation des eux usées provenant de la maison sise sur le fonds C, on se
trouve bien en présence d’un accord tacite pour que se maintienne la servitude.
La destination du père de famille existe. Mais le fait de cette destination ne suffit pas à établir la servitude. En effet, en
matière de servitudes apparentes mais discontinues (or tel est le cas en l’espèce : v. supra), l’article 694 du Code civil
prévoit que le propriétaire, pour se prévaloir de la servitude, doit produire l’acte duquel résulte la division, pour qu’il soit
prouvé qu’il ne comporte aucune clause faisant obstacle à l’établissement de la servitude. Cet acte devrait pouvoir être
produit par les deux enfants survivants de Benoit Pacache. Ils pourraient certes ne pas le fournir Ă  M. Cachecash pour
empêcher ce dernier de se prévaloir de sa propre évacuation. Mais en conséquence, celui-ci pourrait supprimer le tuyau
de son propre terrain, au détriment des propriétaires de la parcelle C.
Les fonds A et B sont donc grevés d’une servitude d’écoulement des eaux usées au profit du fonds C. Toutefois, peut-on
estimer que Jean avait le loisir de se raccorder au tuyau, sans demander d’autorisation à son frère Mathieu ?
C’est extrêmement incertain. On se trouve alors dans une hypothèse non pas d’aggravation d’une servitude au sens de
l’article 702 du Code civil mais de création d’une servitude sans aucun accord de qui que ce soit. Par ce raccordement, le
fonds B qui n’était qu’un fonds servant devient un fonds dominant … au détriment du propriétaire de la parcelle A. Or,
de toute évidence, il ne s’agissait pas d’un raccordement apparent, puisque Mathieu n’en avait pas eu conscience.
Surtout, il ne peut pas être dit plus continu que le tuyau d’évacuation des eaux usées principal (v. supra).
Cette servitude ne correspond pas à une hypothèse de servitude légale (ou du moins pas à une hypothèse de servitude
du Code civil).
Cette servitude n’a pas pu être acquise par un fait de l’homme qu’il s’agisse d’un titre (car aucun accord de volonté entre
les propriétaires), de la prescription (car aucune continuité) ou de la destination du père de famille (car elle est
postérieure à la séparation des fonds).
Mathieu pourrait donc effectivement exiger de Monsieur Cachecash qu’il cesse de déverser des eaux usées via le tuyau
d’écoulement qui longe le chemin indivis, dans le cadre d’une action négatoire.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
3e question : comment analyser l’ouverture des fenêtres de la maison sise sur la parcelle A sur la parcelle B ?
Jean, propriétaire de la parcelle B, a construit une maison à la lisière de la parcelle A. Deux fenêtres su rez-de-chaussée
et deux fenêtres du premier étage donnent sur la rivière. Elles sont donc parallèles à la ligne de séparation des deux
propriétés. On est donc en présence de vues droites. Or une vue droite ne peut être ouverte qu’à une certaine distance
du fonds contigu, fixé par l’article 678 du Code civil à dix-neuf décimètres. En l’espèce on vous indique que la maison est
située à la lisière du fonds contigu. Il faut donc en déduire que la distance est nulle ou presque. Donc, les distances
légales n’ont pas été respectées. La fermeture des fenêtres pourrait donc être exigée.
Toutefois, la question se pose de savoir si le percement de ces fenĂŞtres Ă  des distances qui ne correspondent pas aux
distances légales peut être devenu incontestable par l’écoulement du temps. La question est donc de savoir si une
servitude de vue peut peser sur le fonds A au bénéfice du fonds B.
Ces vues se matérialisent par des ouvrages extérieurs, les fenêtres : la servitude est apparente au sens de l’article 689 du
Code civil.
Ces vues n’ont pas besoin du fait actuel de l’homme pour être exercées : la servitude est continue, au sens de l’article
688.
On se trouve bien en présence d’une servitude apparente et continue qui serait donc susceptible de s’acquérir par
prescription en application de l’article 690 du Code civil. La maison a été construite entre 1972 et 1974. Les fenêtres
existent et donc la vue s’exerce depuis plus de trente ans en 2010.
Mathieu ne peut donc pas menacer M. Cachecash de l’obliger à combler les fenêtres qu’il a ouvertes.
4e question : Comment analyser l’utilisation du puits de la parcelle C par le propriétaire de la parcelle B
Les propriétaires de la parcelle B utilisent le puits situé sur la parcelle C. Le propriétaire de la parcelle C laisse faire et ne
demande aucune indemnité, même lorsque voisin installe de lui-même un système de puisage automatique. La
situation a-t-elle donné naissance à une servitude de puisage ?
Peut-on considérer l’inertie de M. Puissache lorsque Jean lui a demandé d’accéder au puits comme établissant une
servitude de puisage ?
Les servitudes ne doivent pas être confondues avec les actes de simple tolérance qui ne font naître aucun droit au
bénéfice de leur titulaire (art 2232 du Code civil). L’absence d’accord formel du propriétaire du fonds C laisse entendre
que l’on se trouve en présence d’une hypothèse de simple tolérance … D’ailleurs, on voit mal comment, en l’absence de
tout commencement de preuve par écrit, l’existence d’une servitude pourrait dans une telle hypothèse être prouvée. Le
simple usage ne peut certes pas suffire à prouver l’existence d’une servitude. Il faut donc exclure l’établissement de la
servitude par un titre.
Cette analyse est corroborée par le fait que M. Cachecash ne s’est jamais vu exiger le paiement de quoi que ce soit pour
l’utilisation du puits. En effet, ce genre de servitude unilatérale a en général un prix. S’il y avait eu un accord, un prix
aurait certainement été fixé pour l’accès au puits ! Le fait que M. Cachecash n’ait jamais rien eu à payer est significatif :
pour les propriétaires du puits, l’accès laissé à celui-ci ne signifiait pas concession d’une servitude.
Le propriétaire du fonds B a-t-il pu acquérir des droits par prescription ?
La servitude de puisage exige la main de l’homme pour être exercée, elle est donc une servitude discontinue au sens de
l’article 688 du Code civil. Elle ne peut donc pas être acquise par prescription (art. 691 du Code civil). M. Cachecash ne
peut pas se prévaloir d’une prescription acquisitive concernant la servitude de puisage.
On pourrait se demander si l’installation d’un dispositif de puisage automatique n’a pas eu une incidence.
Si l’installation se manifeste par un ouvrage extérieur (pompe, canalisation) un peu conséquent, cette servitude devra
être qualifiée de servitude apparente.
Mais peut-on considérer que l’installation de la pompe a transformé une servitude discontinue en une servitude
continue ? La main de l’homme n’étant plus vraiment nécessaire pour puiser, si elle l’est pour actionner le mécanisme de
la pompe automatique sise sur la parcelle B, ne peut-on pas parler de servitude continue ? La jurisprudence ne le juge
pas ainsi. V. Cass. 3e civ. 19 mai 2004 (doc. 2) : « une servitude est discontinue lorsqu’elle ne peut s’exercer qu’avec une
intervention renouvelée de l’homme et [...] elle reste telle quand bien même elle serait rendue artificiellement
permanente au moyen d’un outillage approprié dès lors que cet outillage ne peut fonctionner que sous le contrôle de
l’homme ». L’installation de la pompe automatique n’a pas changé la nature de la servitude, qui n’est donc pas
susceptible d’être acquise par prescription.
M. Cachecash n’a acquis aucune servitude de puisage. La soeur de Mathieu pourrait donc lui interdire l’accès au puits.
Au terme de l’étude, il faut donc conseiller à M. Cachecash d’accepter les travaux qui rendraient le chemin du nord
carrossable, car les moyens de pression de la famille Pacache sont réels.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
Sujet 2 : Commentaire d’arrêt
1. - Si la servitude et l’indivision partagent le lustre des institutions ancestrales du droit des biens1, elles ne partagent que
cela. Leur incompatibilité semble en effet autant gravée dans l’airain que leur existence, comme le montre cet arrêt
important de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 6 juin 20072.
En l’espèce, deux époux sont propriétaires avec une tierce personne d’un fonds immobilier sous le régime d’une
indivision conventionnelle. L’époux contracte des dettes. Le syndic chargé de la liquidation de ses biens provoque
judiciairement le partage. Suite au partage, des tiers acquièrent par adjudication des parcelles de l’immeuble divisé. L’un
d’entre eux, une société civile immobilière, assigne l’adjudicataire d’une autre parcelle en libération du passage dont
aurait bénéficié son fonds.
La cour d’appel de Nancy, par un arrêt du 7 mars 2006, fait droit à cette demande. Elle considère que le fonds
appartenant à la société civile immobilière bénéficie d’une servitude de passage constituée par destination du père de
famille au cours de l’indivision. La solution est sèchement censurée par la Cour de cassation. Au visa de l’article 693 du
code civil, elle affirme que « des propriétaires indivis ne peuvent constituer une servitude par destination du père de
famille ».
2. - Une lecture rapide de cette solution lapidaire pourrait laisser penser qu’il n’y a rien de nouveau sous la poussière. Par
son classicisme, la solution semble inattaquable. Comment concevoir en effet, que la servitude, ce rapport entre deux
fonds appartenant à des propriétaires différents, puisse s’inscrire dans le schéma de l’indivision, consistant ici dans
l’exercice de droits concurrents sur un fonds unique ?
Toutefois, ce serait là méconnaître la spécificité de la servitude par destination du père de famille. Celle-ci se constitue
en effet par la division d’un fonds unique, sur lequel existe un signe apparent de servitude, en plusieurs parcelles. Le fait
que ces parcelles échoient à des propriétaires différents et que le signe existe encore lors de la division donne naissance
Ă  la servitude.
Or, un tel processus semble correspondre en tous points au partage d’un fonds indivis, lequel entraîne la division du bien
entre des mains différentes. Comment ne pas ainsi envisager l’acte qui met fin à une indivision comme un acte de
division ? Aussi l’exclusion de la servitude par destination du père de famille était-elle loin d’être évidente et supposait, à
tout le moins, une justification qui n’apparaît pas dans la solution.
Dès lors, si l’incompatibilité entre la servitude et l’indivision est fermement prononcée (I), elle n’apparaît
qu’elliptiquement justifiée (II).
I. L’incompatibilité entre servitude et indivision fermement prononcée
L’incompatibilité entre la servitude et l’indivision est classique (A). Elle n’en est pas moins renouvelée par cet arrêt (B).
A. Une incompatibilité classique
3. - La Cour de cassation pose la règle selon laquelle « des copropriétaires indivis ne peuvent constituer une servitude par
destination du père de famille ». La solution s’inscrit dans le refoulement classique de la servitude en présence d’une
indivision. Simplement, celui-ci opère traditionnellement à raison de l’absence de rapport entre deux fonds appartenant
à des propriétaires différents. On sait en effet qu’en vertu de l’article 637 du code civil, la servitude est un rapport entre
deux fonds, un fonds servant et un fonds dominant, par lequel le premier est affecté à l’usage ou à l’utilité du second. Or,
l’indivision renvoie à la copropriété, c’est-à-dire à l’existence d’une pluralité de propriétaires sur un même bien ou sur
une universalité. Dès lors, il est classique de considérer qu’il ne peut y avoir de servitude en présence d’un bien indivis,
faute de rapport entre deux fonds appartenant à des propriétaires distincts. En outre, la servitude constitue pour le
propriétaire du fonds dominant un droit réel sur la chose d’autrui. Le droit de propriété du voisin est amputé de l’un de
ses attributs : l’absoluité, s’il s’agit d’une servitude négative qui interdit au propriétaire quelque chose relativement à son
fonds (construire, planter), l’exclusivité, s’il s’agit d’une servitude positive qui confère au fonds dominant une des utilités
du fonds servant (passer, par ex., comme en l’espèce). Or, rien de tel dans l’indivision : les copropriétaires exercent des
droits identiques et concurrents sur une même chose. Ils sont propriétaires du bien. Aussi la structure de l’indivision ne
peut-elle se concilier avec celle de la servitude, tant au regard de l’analyse de la chose que des droits.
1 Les servitudes existaient à Rome, sous la forme des servitudes prédiales (praedium : immeuble), de même que l’indivision, sous la forme de la
communio, ajoutée par Justinien à la liste de Gaius et qui se dénouait par un partage.
2 Civ. 3e, 6 juin 2007, pourvoi n° 06-1544, à paraître au Bulletin.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
4. - Il était même fait une application extensive de cette règle en présence d’un immeuble en copropriété soumis à la loi
du 10 juillet 1965. La jurisprudence analysait l’immeuble comme un héritage unique, de sorte qu’il ne pouvait y avoir de
servitudes entre parties privatives de l’immeuble3. C’était oublier la division de cet immeuble en lots comprenant des
parties privatives et une quote-part de parties communes. Chaque copropriétaire étant propriétaire exclusif des parties
privatives comprises dans son lot, on retrouve nécessairement, en présence d’une servitude entre parties privatives, un
rapport entre deux fonds appartenant à des propriétaires différents. La Cour de cassation s’est finalement ralliée à cette
analyse par un revirement4.
Pour le reste, en présence d’une indivision ordinaire, pour laquelle il n’existe pas de division du fonds mais un fonds
unique, il ne peut y avoir de rapport de servitude. La solution rendue semble donc s’inscrire dans cette incompatibilité
classique entre servitude et indivision.
Toutefois, elle est beaucoup plus novatrice qu’il n’y paraît de prime abord, car n’était pas en jeu l’existence simultanée
d’une indivision et d’une servitude, par essence impossible, mais la possibilité qu’une servitude succède au partage
d’une indivision.
B. Une incompatibilité renouvelée
5. - La solution est d’abord innovante en ce qu’elle vient réveiller un mode particulier de constitution de servitude
quelque peu tombé dans l’oubli : la destination du père de famille5. Par le « père de famille », le code désigne en réalité
l’ancien propriétaire d’un fonds unique ultérieurement divisé. Pour qu’il y ait destination du père de famille, rappelons
que deux éléments sont successivement requis.
Il faut, tout d’abord, que le propriétaire ait réalisé sur son fonds un aménagement matériel apparent qui, s’il avait été
réalisé sur deux fonds distincts, aurait constitué un rapport de servitude : une porte, un aqueduc, un chemin…
Il faut, ensuite, que lors de la division du fonds l’aménagement matériel subsiste, q’il relie deux fonds acquis par des
propriétaires différents et qu’il n’existe aucune clause dans l’acte de division contredisant l’existence d’une servitude.
Se constitue alors une servitude par destination du père de famille par déduction des faits et induction d’une volonté
tacite des parties en présence. La servitude par destination du père de famille permet ainsi de pallier l’absence de titre
constituant expressément une servitude entre deux fonds.
C’est ce qu’invoquait la société immobilière en l’occurrence : un passage aménagé par les indivisaires s’était maintenu
lors de la division du fonds et avait donc donné naissance à une servitude par destination du père de famille. Mais la Cour
de cassation réfute une telle constitution. Elle observe en effet qu’avant la division du fonds, celui-ci n’appartenait pas à
un propriétaire unique mais était au contraire en indivision. Ainsi, ce n’était pas l’obstacle classique tiré de l’absence de
rapport entre deux fonds qui faisait ici difficulté, puisque celui-ci existait bel et bien en l’espèce du fait du partage, mais
la situation juridique du bien avant cette division.
6. - Dans ce cadre, la Cour de cassation rappelle sobrement la teneur de l’article 693 du code civil : « il n’y a destination
du père de famille que lorsqu’il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire
et que c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ». Ainsi, avant la division du fonds,
celui-ci doit avoir appartenu au « père de famille», ce qui exclut, aux yeux de la Haute juridiction, une pluralité de
propriétaires sous la forme d’une indivision.
Cette interprétation littérale du texte semble d’autant plus conforme au Code que la servitude par destination du père
de famille est un mode marginal de constitution des servitudes. En effet, il ne s’agit que d’un mécanisme permettant de
pallier l’absence de volonté expresse de constituer une servitude par titre6. La formulation négative de l’article 693 et
son domaine restreint soulignent au demeurant le caractère exceptionnel de cette forme de servitude.
7. - Si la solution semble évidente, c’est pourtant la première fois à notre connaissance que le problème se posait
exactement en ces termes. Faute de toute incidence pratique ?
Le constat, vrai en 1804, l’est beaucoup moins aujourd’hui. Si l’indivision n’était aux temps du Code Napoléon qu’une
phase provisoire dans l’attente du règlement d’une succession, elle est devenue, avec la réforme du 31 décembre 1976,
une institution pérenne et réglementée permettant d’organiser l’appropriation collective d’un patrimoine, comme le
3 Civ. 3e, 6 mai 1991, Bull. civ. III, n° 75 ; RTD civ. 1991, p. 565, obs. F. Zenati.
4 Civ. 3e, 30 juin 2004, Bull. civ. III, n° 140 ; RTD civ. 2004, p. 753, obs. Th. Revet.
5 On retrouve l’existence de la destination du père de famille dans l’ancienne coutume de Paris, rédigée en 1510 (art. 91). Mais selon certains, la Grande
Glose d’Accurse, du milieu du XIIIe siècle, paraît être le premier texte doctrinal à l’admettre, même si elle n’était curieusement pas pratiquée dans les
pays de droit écrit (J.-Ph. Lévy, A. Castaldo, Histoire du droit civil, Dalloz, 2002, n° 431.
6 Cette analyse ressort de l’article 692 du code civil : « la destination du père de famille vaut titre à l’égard des servitudes continues et apparentes ».
Lorsque la servitude est apparente mais discontinue, elle ne vaut pas titre, au sens où celui qui l’invoque doit produire l’acte de division afin d’établir
qu’il ne contient aucune clause contredisant l’existence de la servitude.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
montre au demeurant la présente espèce7. Dès lors, si la Haute juridiction permettait la constitution de servitudes par
destination du père de famille par l’effet du partage d’une indivision - qui est l’issue inéluctable de celle-ci –, cela ne
manquerait pas de se traduire substantiellement dans les faits. Sans doute la Haute juridiction a-t-elle ainsi voulu éviter
que se constituent en l’absence de titre, de manière purement spontanée, des servitudes, qui sont autant d’atteintes au
droit de propriété.
On ne peut néanmoins se satisfaire d’une incompatibilité aussi elliptiquement justifiée, fût-elle opportune.
II. L’incompatibilité entre servitude et indivision elliptiquement justifiée
8. - Afin de censurer la Cour d’appel, la Haute juridiction se contente, au visa de l’article 693 d’une solution péremptoire
et définitive : « des propriétaires indivis ne peuvent constituer une servitude par destination du père de famille ». On peine à
identifier la motivation profonde d’une telle impossibilité.
Derrière ces non-dits de la Cour de cassation, il est pourtant possible de percevoir le fondement technique de la
solution : l’effet déclaratif du partage8.
Si cet appel à l’effet déclaratif du passage n’est qu’implicite (A), il apparaît à l’examen implacable (B).
A. L’appel implicite à l’effet déclaratif du partage
9. - Le seul visa de l’article 693 du code civil ne peut suffire à justifier la solution. Il est en effet possible d’arguer que le
partage consiste précisément dans la division d’un fonds indivis en plusieurs parties distinctes, ce qui correspond très
strictement au mécanisme de la servitude par destination du père de famille. Au demeurant, les indivisaires ayant été
propriétaires de la chose commune, rien ne leur interdisait de réaliser avant le partage, comme tout propriétaire, un
signe apparent de servitude. La considération d’une multiplicité de propriétaires ne doit-elle pas s’effacer derrière l’unité
du fonds, eu égard au fait que la servitude constitue un rapport entre fonds, non entre personnes ?
10. - Le fondement technique de la solution doit donc être recherché ailleurs. Derrière la formule péremptoire de la Cour
de cassation, se cache implicitement l’effet déclaratif du partage, tel que posé par l’article 883 du code civil. Selon ce
texte, « chaque héritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot, ou à lui échus
sur licitation, et n’avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession ». Ainsi, par l’effet de la rétroactivité, le
copartageant ne tient pas ses droits de l’indivision : il est censé avoir été propriétaire, dès le décès, du lot qui lui est
attribué.
La règle, posée pour les indivisions successorales, vaut en réalité pour toutes les indivisions. Loin d’être un artifice
législatif, l’effet déclaratif du partage participe en effet de la conception même de l’indivision.
Parce que les droits des indivisaires flottent sur les biens indivis, sans se fixer matériellement sur aucun, chaque
copartageant « tient sa propriété privative de la reconnaissance par tous que les biens mis dans son lot forment l’objet de
son droit (…) ; c’est le même droit qui appartient à l’héritier avant et après le partage (…) ; ce qu’il a obtenu des autres, ce
n’est pas la cession de leurs droits, mais la reconnaissance de l’objet du sien »9.
La Cour de cassation vient alors apporter une nouvelle conséquence à la déclarativité du partage. Parce que chacun des
copartageants est dès l’origine propriétaire de la partie du fonds qui lui a été attribuée, il ne peut y avoir de servitude par
destination du père de famille. Fait inexorablement défaut l’existence d’un fonds unique ultérieurement divisé, puisque
le bien indivis sur lequel se sont exercés des droits concurrents est censé n’avoir jamais existé.
11. - Pourtant, la consultation de décisions du 19e siècle laisse apparaître une solution contraire. Ainsi, dans un arrêt du 7
avril 1863, la Cour de cassation décide « que si l’article 694 c. nap., par le mot dispose, semble se référer plus
particulièrement à un acte de vente, d’échange ou de donation, on ne saurait en conclure que cet article cesse de recevoir son
application au cas où une propriété d’origine commune a été divisée par l’effet du partage ; que la raison de décider est la
même dans ces divers cas ; qu’en effet, la disposition étant fondée sur une présomption de consentement tirée du silence des
parties, cette présomption s’applique aussi bien aux partages qu’aux aliénations à titre onéreux ou gratuit ; qu’elle est peutêtre
même plus forte en cas de partage, à cause des opérations préparatoires qui ont pour objet d’assurer une égale
composition des lots »10.
7 P. Catala, « L’indivision », Defrénois 1979, art. 31874, spéc. p. 22.
8 La consultation du site de la Cour de cassation et du calendrier des arrêts rendus nous apprend d’ailleurs que la question de l’effet déclaratif était
posée.
9 M. Grimaldi, Droit civil, Successions, 6e éd., 2001, Litec, n° 912 ; F. Zenati et Th. Revet, Les biens, 2e éd., PUF, coll. Droit fondamental, 1997, n° 288 s.
10 Civ. 7. avr. 1863, DP 1863, 1, 413 ; 27 mars 1866, DP 1866, 1, 339.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
Est-ce à dire que la Cour de cassation procède à un lointain et soudain revirement de jurisprudence ? Il n’en est rien. En
effet, dans les arrêts mentionnés, l’aménagement matériel n’avait pas été effectué pendant l’indivision, mais avant
l’indivision, par l’auteur commun des indivisaires, à savoir le de cujus. Dès lors, l’effet déclaratif du partage n’était pas en
cause, puisqu’il y avait bien un fonds unique, appartenant au de cujus, ultérieurement divisé entre les héritiers. Dans ce
cas, la déclarativité du partage a seulement pour effet de faire remonter la division du fonds à la date du décès.
Toute autre est la situation soumise à l’arrêt du 6 juin 2007. Il s’agit d’une constitution d’un signe de servitude en cours
d’indivision, par les indivisaires. Dès lors, l’effet déclaratif du partage interdit la constitution d’une telle servitude, car il
n’y a pas de division d’un fonds unique, mais dès l’origine des fonds distincts appartenant privativement aux
copartageants.
Dès lors, si l’on veut jeter un pont entre ces arrêts que deux siècles séparent, il convient de distinguer selon que
l’aménagement de servitude - aqueduc, par ex. - a été réalisé en cours d’indivision par des indivisaires, auquel cas toute
servitude est à exclure, ou avant l’indivision, par leur auteur commun (de cujus, vendeur, …), auquel cas la servitude par
destination du père de famille peut se constituer, l’effet déclaratif du partage n’ayant pour autre conséquence que de
situer la division dès l’instant du décès ou du transfert initial (vente)11.
La solution de la Cour de cassation apparaît alors implacable.
B. L’appel implacable à l’effet déclaratif du partage
12. – La solution apparaît d’abord implacable parce qu’une autre justification peut être avancée à son soutien, qui tient
toujours à la nature du partage. Si le partage est déclaratif, il présente aussi un caractère nécessaire.
Ainsi, le principe posé par l’article 815 du code civil, qui inaugure et domine tout le régime de l’indivision, permet à
chaque indivisaire de mettre fin à tout moment à l’indivision. Dès lors, l’acquisition de leur lot par les autres
copartageants n’est pas purement volontaire, puisqu’ils subissent la substitution d’un droit sur des biens déterminés à
leur droit sur une masse indivise12.
Or, dans l’opinion commune, la servitude par destination du père de famille constitue une présomption légale de
volonté permettant de pallier l’absence de titre formalisant une servitude13. Ainsi, le maintien de l’aménagement
matériel lors de la division du fonds et l’absence de volonté contraire exprimée dans l’acte permettent de présupposer la
volonté des propriétaires de constituer une servitude entre les fonds issus de la division. Or, en présence du partage d’un
fonds indivis entre indivisaires, il apparaît impossible, sinon difficile, de présumer une volonté des attributaires de
constituer entre leurs fonds une servitude par destination du père de famille.
Le raisonnement de la Cour de cassation, mĂŞme implicite, semble donc imparable.
13. - On pourrait toutefois rétorquer que le bien a ici été vendu en parcelles par adjudication à des tiers. Or, il est admis
en doctrine14 et en jurisprudence15 qu’une telle adjudication prononcée au profit d’un tiers n’est pas déclarative. Elle
constitue une opération translative, une vente, comme l’avait pressenti dès le 14e siècle Bartole16. Dans ce cas,
l’adjudicataire ne tient pas ses droits du copartageant, mais des coïndivisaires17. Ce n’est que dans les rapports des
copartageants entre eux que la licitation au profit d’un tiers constitue une opération de partage.
Mais il ne faut pas se méprendre sur ce point. L’adjudication d’un bien indivis au profit d’un tiers acquéreur ne se produit
qu’en présence d’une licitation préalable au partage. Cela concerne exclusivement l’immeuble qui ne peut être
commodément partagé en nature au sens de l’ancien article 827 du code civil, applicable à la cause, et qui est alors licité
par adjudication. Il est à noter que la réforme du 23 juin 2006 laisse inchangée une telle règle, ne faisant que la
transporter dans le Nouveau code de procédure civile tout en substituant à l’expression « non commodément
11 Cet effet n’est pas pour autant dépourvu de toute incidence pratique. On peut ainsi considérer qu’il suffit que l’aménagement matériel de servitude
existe au moment du décès, peu important que les indivisaires ou l’un d’entre eux l’aient ensuite supprimé car la division intervient dès la date du
décès.
12 Cette analyse vaut surtout lorsque le partage est judiciaire. Lorsqu’il est amiable, elle est plus fragile.
13 F. Terré, Ph. Simler, Les biens, 6e éd., Dalloz, 2007, n° 900.
14 Ph. Malaurie et L. Aynès, Les successions, Les libéralités, 2e éd., Defrénois, 2006, n° 990.
15 Cass. ch. Réunies, 5 déc. 1907, DP 1908, 1, 113 ; S. 1908, I, 5 : « si l’adjudication sur licitation d’un immeuble dépendant d’une hérédité doit, à l’égard
de l’adjudicataire, quand il est un tiers étranger à l’indivision, être considérée comme une vente, elle constitue dans les rapports des cohéritiers entre
eux une opération préliminaire du partage ; dès lors, la créance du prix entre dans l’actif à partager pour y être soumise, comme l’aurait été l’immeuble
qu’elle remplace, aux règles ordinaires du partage » (nous soulignons).
16 Lévy et Castaldo, op. cit., n° 1008.
17 V. dans ce sens, F. Terré et Y. Lequette, Les successions, 3e éd., Dalloz, 1997, n° 987 ; Ph. Malaurie et L. Aynès, op. cit., n° 990 ; Mazeaud, Chabas,
Successions et libéralités, 5e éd., par L. Leveneur et S. Leveneur, Montchrestien, 1999, n° 1762.
________________
Copyright © 2010 Pré-Barreau
partageable », celle de bien « non facilement partageable »18. L’adjudication est dans ce cas une opération préalable au
partage, et elle entraîne un transfert de propriété du bien indivis au profit du tiers acquéreur.
14. - Il n’en va pas ainsi dans la présente affaire. La consultation de l’arrêt d’appel nous apprend que le fonds immobilier
a d’abord été partagé entre les coïndivisaires. Ce n’est que dix ans plus tard que les parcelles ont fait l’objet d’une
adjudication au profit de tiers. Ainsi, ceux-ci n’ont fait qu’acquérir les lots échus aux copartageants. Par suite, il ne
s’agissait pas d’opérations préalables au partage, mais d’opérations consécutives au partage. En conséquence, les
différents adjudicataires ont acquis leur bien non de l’indivision, mais de chaque copartageant.
L’effet déclaratif du partage s’oppose alors à la constitution d’une servitude par destination du père de famille, car les
deux adjudicataires tiennent leurs droits de deux propriétaires différents, ceux-ci étant considérés dès l’origine
propriétaires des parcelles qui leur ont été attribuées lors du partage. Fait inexorablement défaut l’existence d’un fonds
unique ultérieurement divisé.
15. - Est-ce à dire qu’il en serait allé autrement si l’immeuble indivis avait été adjugé avant le partage ? Il n’en est rien. En
effet, la licitation n’a lieu que dans l’hypothèse où l’immeuble n’est pas commodément - facilement désormais -
partageable en nature. Dès lors, de deux choses l’une : soit le bien n’est pas commodément partageable, de sorte qu’il
sera vendu sans être divisé à un tiers par licitation, sous réserve du jeu de l’attribution préférentielle. Il y a bien alors un
transfert de propriété entre les indivisaires et le tiers, mais l’on ne peut concevoir de servitude constituée par destination
du père de famille, faute de division du bien en parcelles distinctes19. Soit au contraire le bien est commodément
partageable en nature, et l’attribution du bien aux indivisaires doit être préférée à la vente, de sorte que fait défaut cette
fois l’existence d’un transfert de propriété direct entre l’indivision et le tiers acquéreur. En effet, si adjudication il y a, elle
sera postérieure au partage et le transfert de propriété n’aura lieu qu’entre chaque copartageant et les tiers.
De quelque point de vue que l’on se place, et même si l’on peut regretter la motivation trop elliptique de la Cour de
cassation, l’impossibilité pour des indivisaires de constituer une servitude par destination du père de famille sur leur
fonds apparaît implacable.
Elle s’avère en outre conforme à la nature des choses. Il semble ainsi difficile de concevoir qu’une servitude soit enfantée
18 Ainsi, en vertu du décret n° 2006-1805 du 23 décembre 2006 relatif à la procédure en matière successorale et modifiant certaines dispositions de
procédure civile, le nouvel article 1377 du Nouveau code de procédure civile prévoit, dans un paragraphe consacré à la licitation, que « le tribunal
ordonne, dans les conditions qu'il détermine, la vente par adjudication des biens qui ne peuvent être facilement partagés ou attribués » (Nous soulignons).
19 Dans l’hypothèse où ce tiers acquéreur diviserait ensuite le bien en différentes parcelles, il ne pourrait y avoir pour autant de servitude constituée par
destination du père de famille, sauf si le tiers est lui-même l’auteur de l’aménagement de servitude. Mais s’il a été réalisé pendant l’indivision, toute
constitution de servitude apparaît impossible.
Signature de Jean-Michel Lugherini 
Cordialement

Édité par - Jean-Michel Lugherini le 05 déc. 2010 07:06:30
 
Sujet prĂ©cĂ©dent Sujet Sujet suivant  
 
Aller Ă :  
Imprimer le sujet Imprimer le sujet
Partager ce sujet Partager ce sujet
 
Universimmo.com © 2000-2012 AEDev Revenir en haut de la page
   












Copyright © 2000-2025 UniversImmo - SAS AEDév - tous droits réservés.
Informations légales | Contactez nous