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Le coût du logement : un boulet pour la compétitivité de l'économie française ! Le 9/11/2012
UI - Actus - 9/11/2012 - Le coût du logement : un boulet pour la compétitivité de l'économie française !
C'est une lacune du rapport Gallois pour la compétitivité de l'industrie française. Les prix de l'immobilier sont un handicap sérieux pour l'économie par au moins trois effets : ils pèsent lourdement, par le biais des loyers ou des remboursements de crédits, sur le pouvoir d'achat des ménages et prélèvent des ressources au détriment de la consommation, ils alourdissent les charges des entreprises, et opèrent un transfert d'épargne au détriment d'investissements productifs ! Dans un pays où on ne tarit pas sur l'engouement des Français pour la "pierre", et où l'immobilier n'est considéré comme "dynamique" que quand il monte, ce constat pourtant simple n'a pas valeur d'évidence. Le directeur des études de l'Institut Xerfi, Alexandre Mirlicourtois, ne craint pas de faire entendre une voix dissonante...

Les prix immobiliers tiennent bon : atout ou handicap ?



"Une correction forte des prix de l'immobilier a eu lieu presque partout, sauf en France !", s'étonne Alexandre Mirlicourtois, directeur des études de l'institut d'études économiques sectorielles Xerfi : par rapport à leur dernier pic, l'ajustement n'a été que de 0,5% alors que le décrochage a été de 20% au Royaume Uni, de 24% en Espagne et de 31% aux Etats-Unis. Certes, ils n'ont pas décroché en Allemagne ou au japon, mais ils y sont restés très sages depuis les années 2000. Et de poser la question : l'immobilier cher est-il un atout ou un boulet pour l'économie française ?

"Car des prix de l'immobilier surévalués se traduisent aussi par la cherté des loyers et des autres dépenses afférentes au logement", poursuit-il, invitant à comparer avec nos voisins immédiats : selon Eurostat, le coût moyen des dépenses liées au logement sont en France de 27% supérieurs à la moyenne européenne, et même si les prix sont le reflet du niveau de vie, ce coût est supérieur à celui de nos voisins à niveau de vie comparable : notamment celui cité souvent en exemple par les temps qui courent, l'Allemagne, que la France surclasse de 17 points ! Elle surclasse aussi l'Italie de 23 points et l'Espagne de 24... Pour les ménages c'est autant de pouvoir d'achat libéré pour consommer, notamment des produits et services produits par le pays !

Mais ce n'est pas la seule conséquence, fait remarquer Alexandre Mirlicourtois : "le faible coût de l'immobilier, aussi bien résidentiel que commercial, est un élément-clé de la compétitivité outre-Rhin ! Premièrement parce que la modération salariale est plus facile à mettre en oeuvre dans un pays où le coût du logement est maîtrisé et n'entame pas trop le budget des salariés. Deuxièmement, plus directement, le prix des structures commerciales réduit les coûts fixes des entreprises. Or le déflateur de l’investissement dans la construction s’est élevé de 51% en France contre 23% en Allemagne entre 2000 et aujourd’hui. Du simple au double !", se désole-t-il.

Du coup, les prix élevés de l’immobilier pèsent sur notre croissance sans résoudre le problème du logement ! Et de conclure que "la France est face à un choix politique cornélien : d’un côté, défendre la valorisation de son patrimoine immobilier, ce qui satisfait une France d’épargnants et de propriétaires, de l’autre, faire baisser le prix du logement et de l’immobilier, surtout en zone urbaine. Ce serait un moyen pour donner des marges de manœuvre à une politique de modération salariale sans entamer le pouvoir d’achat".

En clair, l'argent pas cher et les multiples aides publiques à l'accession (la politique du "tous propriétaires") ont emballé le marché immobilier et entraîné un transfert massif de richesse au profit des propriétaires et des investisseurs en immobilier, au détriment des salariés et des producteurs. Même si ces deux populations se recoupent, elles sont loin d'être les mêmes ! D'un côté une France qui rit, voyant se valoriser son patrimoine et réduire en proportion son endettement, et de l'autre une France étouffée par les dépenses contraintes, dont le logement constitue la plus grande part, et dépendante d'un budget d'aides au logement qui ne cesse de gonfler (1) !

Enfin, et ce n'est pas le moindre des effets pervers, la politique du laisser faire à l'égard de l'immobilier a aussi détourné l'épargne, notamment celle qui vise à se constituer un patrimoine pour la retraite, de l'investissement productif au profit de la pierre, qui ne s'exporte que marginalement ! Probablement une des causes du déficit d'investissement dont souffre aujourd'hui cruellement l'industrie française...


Le coup d'arrêt à la hausse : une opportunité ?



Le ralentissement du marché immobilier n'aurait pas, dans cette perspective, que des inconvénients. Ses causes trouvent leurs sources dans la crise financière mondiale et européenne (les contraintes de solvabilité imposées au banques) et dans les conséquences économiques des politiques d'austérité qui se généralisent, mettant des millions de ménages dans des perspectives incertaines quand ce n'est pas déjà dans la difficulté. Mais tel quel, il pèse plus sur les promoteurs, les constructeurs de maisons individuelles, les professionnels de l'immobilier et toute la filière du bâtiment, que sur les prix. La baisse d'activité est catastrophique pour ces secteurs, de 20 à 30%, et risque d'alimenter la récession qui menace.

Pour la construction, une relance énergique est une nécessité et les mesures du nouveau gouvernement - mesures en vue d'augmenter l'offre de terrains et augmentation des aides à la pierre - vont dans le bon sens, en attendant qu'elles produisent des résultats, probablement pas avant 2014-2015. Mais elles risquent d'être insuffisantes : elles vont donner un coup de fouet à la construction de logements sociaux, mais pas à la construction privée faute de demande d'accédants solvables, ce qui manque le plus aujourd'hui dans les bureaux de vente des promoteurs ou des constructeurs de maisons individuelles.

Le "choc d'offre" censé être créé par l'abattement provisoire de 20% sur les plus-values en 2013 peut de son côté relancer un peu le marché de l'ancien, avec un effet bénéfique sur les prix par l'apport de biens à vendre. Mais il ne faut pas trop en attendre : le marché est d'abord un marché de résidences principales et cette mesure fiscale ne le concerne pas... En attendant, les agents immobiliers, durement touchés par une chute des transactions atteignant 20% globalement et jusqu'à 30% par endroits, devront d'abord chercher à augmenter leur part de marché sur le "particulier à particulier"...

Pour stopper la spirale des prix, il faut d'abord "casser" le prix des terrains, seule façon de faire baisser les prix du neuf, susceptible d'entraîner à leur tour ceux de l'ancien. Or le m2 de terrain constructible a encore augmenté de 7,6% en 2011 par rapport à 2010. Les moyens pour cela sont multiples : alourdir nettement la taxation de la rétention de terrains constructibles, notamment par la taxe foncière sur les propriétés non bâties (c'est une suggestion du rapport Gallois), mais aussi donner aux maires ou aux communautés d'agglomération les moyens juridiques de conditionner les permis de construire à l'application de prix plafonds pour les m2 vendus : comme on sait, le prix des terrains se fixant "à rebours" en fonction du prix de vente envisagé et du coût de construction (bénéfice inclus), les propriétaires de terrains ne pourront que suivre...

Enfin, de manière générale, on n'arrêtera le transfert de richesse de la France productive vers la France épargnante et propriétaire que par une taxation nettement plus forte des biens immobiliers non affectés à la résidence principale : notamment les résidences secondaires, là encore par la taxe foncière. Et tant mieux si des ressources accrues pour les collectivités permettent de diminuer au passage les dotations de l'Etat...


L'encadrement des loyers : plus que jamais une nécessité



Autre moyen de peser sur les prix, un encadrement des loyers non pas seulement à la hausse, mais aussi à la baisse, dans les zones tendues, qui sont aussi celles où se concentrent les salariés du tissu productif du pays. Pas évidemment celui mis en place par le décret du 20 juillet qu'à 62% les propriétaires, interrogés par l'IFOP pour le site Gereseul.com, n'ont pas l'intention d'appliquer, ce qui donne une idée du civisme ambiant dans certaines catégories d'épargnants. Mais celui annoncé avec la mise en place des observatoires des loyers, à l'allemande (2) ! Certes, une telle mesure reviendrait à sacrifier une génération d'investisseurs qui ont acheté au prix fort et qui verraient leur rentabilité lourdement grevée. Mais à vouloir les protéger, c'est une économie touts entière qu'on bride, avec un coût du logement déraisonnable.

A un moment où l'on cherche à éviter qu'elle ne soit étouffée par les ponctions fiscales et la réduction des dépenses publiques, une baisse des prix de l'immobilier ferait à coup sûr l'effet d'un ballon d'oxygène salutaire !


(1) Universimmo.com - 24/8/2012 : L'urgence d'une remise à plat des aides au logement

(2) Universimmo.com - 16/6/2012 : Encadrement des loyers : la fin de l'immobilier locatif privé ?

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