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Investisseurs : les meublés sont-ils aussi intéressants qu'on le dit ? Le 19/3/2003
UI - Actus - 19/3/2003 - Investisseurs : les meublés sont-ils aussi intéressants qu'on le dit ?
Les meublés sont à la mode : les médias ne tarissent pas sur leurs avantages légaux et fiscaux, au point qu'on a pu lire ici et là qu'on trouverait bientôt plus de meublés offerts à la location que de logements vides ! En fait il n'en est rien - les meublés restent très marginaux en proportion du parc locatif privé - et il faut rassurer ceux qui n'ont pas succombé à cet engouement : ils ne sont pas forcément dans l'erreur...

Le leitmotiv est simple : pourquoi s'ennuyer avec les contraintes de la loi du 6 juillet 1989 et subir la fiscalité confiscatoire des revenus fonciers, alors qu'on peut s'affranchir des deux à la fois avec quelques meubles et un bail de logement meublé !

A y regarder de plus près, c'est un peu plus compliqué que cela...

Attention à l'article L631-7...

C'est un détail que beaucoup ne connaissent pas, mais le même article du Code de la construction et de l’habitation qui interdit - sauf dérogation - de transformer dans les villes de plus 10.000 habitants et à Paris et 50 km autour un logement en bureau ou en local professionnel, interdit aussi de le transformer en meublé, assimilé à un local commercial (article L631-7), sauf à faire revenir à l'habitation une surface équivalente (on peut acheter des "droits de commercialité" sur un marché un peu "underground" que tiennent entre eux les marchands de biens...) ! Cette disposition s'applique à tout loueur considéré comme professionnel au sens de la loi n° 49-458 du 2 avril 1949, c'est à dire tout loueur de plus d'un meublé...

Il est vrai que la mesure n'est appliquée avec zèle qu'à Paris, avec cependant contrôles fréquents sur informations communiquées par l'administration fiscale et mises en demeure de régulariser...


Le logement peut ne pas trouver facilement preneur !

Si l'on met à part le meublé de tourisme, le meublé d'habitation s'adresse à des populations bien caractérisées, aux besoins précis : pour les cadres supérieurs en séjours de quelques mois à deux ans, il faut des logements de qualité, dans des immeubles de qualité, dans des quartiers chics ou "branchés", et un ameublement et une décoration de bon goût ; pour les étudiants, de petits loyers et un emplacement bien adapté, leur permettant d'accéder facilement à leurs lieux de vie : école ou faculté et quartiers de fréquentation ; pour les divorcés ou séparés en transit, un logement confortable de bon niveau, avec deux ou trois chambres pour y loger leurs enfants quand ils en ont la garde ; enfin pour les populations précaires, seul compte le prix, mais gare à la "décence" (décret du 30 janvier 2002)...

Ne pas choisir, c'est s'exposer à voir son logement vacant, ou le voir utilisé comme hébergement temporaire en attendant de trouver mieux...


Le loueur en meublé est exposé à des changements fréquents de locataires !

Le meublé n'a pas vocation à constituer un logement stable : ne pas avoir ses propres meubles est une situation qui ne se produit que quelques fois dans la vie : quand un jeune quitte ses parents, en cas de séparation (pour celui qui part en laissant tout à son "ex"), en cas de tombée dans la précarité, et en cas de mission professionnelle temporaire loin de chez soi...

Les changements de locataires sont donc le lot quotidien des loueurs en meublé, et ils coûtent cher : frais d'agence, frais d'état des lieux, nécessité, outre les dégradations, de fréquentes remises en état de vétusté qu'il n'est ni légal ni toujours facile de récupérer sur le dépôt de garantie (les locataires partent en ne réglant pas les derniers loyers)...

Les meublés de luxe, les plus mirobolants, sont aussi ceux qui ne peuvent être reloués qu'impeccables, d'où une intervention nécessaire pratiquement à chaque départ pour nettoyer et rafraîchir, et aussi remplacer les éléments d'ameublement et d'équipement ménager cassés, hors d'usage ou manquants !

Attention aux faux meublés !

Une table, trois chaises et un lit ne suffisent pas pour éviter la requalification en location soumise à la loi du 6 juillet 1989 : sans tomber dans l'équipement du meublé de tourisme, il faut un assortiment de vaisselle, d'ustensiles de cuisine et de ménage complet, un réfrigérateur, une cuisinière, etc.

Et un état des lieux comportant inventaire précis de tout cela pour en apporter la preuve en cas de besoin...

Ne pas oublier aussi que le propriétaire qui loue avec meubles et équipements (lave vaisselle, lave-linge, télévision... )doit les réparer quand ils tombent en panne (le locataire ne doit que le petit entretien !) et remplacer à première demande quand ils deviennent hors d'usage, ou que leur réparation coûte presque aussi cher que l'achat d'un équipement neuf...


Le fait d'échapper à la loi de 1989 n'a en réalité que peu de conséquences pratiques...

Les avantages du bail "libre" de location meublée, qui font se pâmer les allergiques à la législation restrictive des vingt dernières années, ne sont-ils pas illusoires ?

Celui de pouvoir faire des baux courts et donner congé en fin de bail sans justification, même pour relouer plus cher ou évincer un locataire récalcitrant, trouve vite ses limites dans la pénalisation que constitue pour la rentabilité du placement le "turn-over" trop important de ce type de logements ! Un bien d'investissement est destiné à être loué, et la loi du 6 juillet 1989 autorise le congé pour vente et pour reprise...


Des locations globalement plus risquées !

La clientèle du meublé, moins stable, plus volatile et parfois plus précaire, est aussi plus encline à s'affranchir des obligations du bail : respect du logement et paiement du loyer ! Elle est aussi moins "saisissable", et s'agissant de résidence principale du locataire, le bailleur subit les mêmes contraintes pour le recouvrement de sa créance et la récupération de son bien qu'en location classique, et il ne peut même pas saisir les meubles...


La fiscalité du meublé peut être moins intéressante que celle de la location classique !

Si l'on oublie le statut de loueur en meublé professionnel (dit "LMP" - voir notre article), hors d'atteinte du commun des mortels (minimum 23.000 euros de recettes TTC tirées des locations en meublés ou 50% des revenus globaux), certes intéressant mais aux contraintes multiples et notamment celles de l'inscription au registre du commerce, de cotisation aux caisses des non salariés et de tenue d'une comptabilité sérieuse, le régime des "micro-BIC" (régime simplifié des bénéfices industriels et commerciaux) n'est pas intéressant en cas de déficits ! La déduction des charges est en effet forfaitaire et fixée à 72%, ce qui n'est pas intéressant en cas de travaux et d'emprunt importants : en revanche, dans la location classique, non seulement ceux-ci sont déductibles en totalité, mais de surcroît le déficit peut être reporté sur le revenu global jusqu'à hauteur de 10.700 euros !

Or ce sont justement les investissements qui permettent ces déficits et ce report (appartements anciens achetés à crédit avec des travaux importants déductibles) qui ont, pour les contribuables fortement taxés sur le revenu, le meilleur retour après impôt sur le capital investi !

Sans oublier que le loueur en meublé est aussi soumis à la taxe professionnelle...


Intérêt réel ou engouement idéologique ?

C'est la question que tout observateur avisé ne peut éviter de se poser, et surtout celle de savoir si l'engouement est réel ou fantasmé : le journal Le Monde rapportait récemment (2/12/02 - voir notre revue de presse) qu'une "nouvelle agence spécialiste du meublé ouvre, chaque semaine ou presque, à Paris", mais comme par hasard, on a beau chercher, il n'en est jamais cité qu'une dans tous les articles sur le sujet...

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