FICHES PRATIQUES COPROPRIETAIRES
Créer un ascenseur en copropriété
Créer un ascenseur en copropriété
Investissement parmi les plus créateurs de valeur que l'on peut faire dans un patrimoine existant, c'est aussi une des opérations les plus complexes pour la prise de décision au moins autant que pour sa réalisation... Certes le montant de la quote-part individuelle est élevé - il peut atteindre 50 à 80.000 francs voire plus pour les grands appartements et les étages élevés - mais de nombreuses aides et avantages fiscaux peuvent alléger le coût réel. La difficulté d'arriver à un large consensus tient surtout en réalité à l'appréciation très variable de l'utilité de l'équipement d'un copropriétaire à l'autre, et probablement aux différences de sensibilité à la valorisation patrimoniale qu'une telle création peut entraîner...

Création d'un élément d'équipement commun nouveau, la création d'un ascenseur est le type même de ce que la loi du 10 juillet 1965 désigne comme "travaux comportant amélioration". La décision de tels travaux requiert une majorité élevée : elle se prend par l'assemblée générale statuant dans les conditions prévues à l'article 26 de cette loi, à savoir "à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix" de tous les copropriétaires, et, à défaut d'avoir été approuvés dans ces conditions de majorité, les travaux d'amélioration "qui ont recueilli l'approbation de la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix des copropriétaires présents ou représentés peuvent être décidés par une nouvelle assemblée générale, convoquée à cet effet, qui statue à cette dernière majorité".

Par ailleurs, étant donné que l'équipement n'existait pas à la création de la copropriété, le règlement de copropriété ne pouvait prévoir de grille de répartition des charges correspondantes entre les copropriétaires ; la même assemblée doit par conséquent, comme y pourvoit très judicieusement l'article 30 de la même loi, fixer, "à la même majorité, la répartition du coût des travaux (...), en proportion des avantages qui résulteront des travaux envisagés pour chacun des copropriétaires, sauf à tenir compte de l'accord de certains d'entre eux pour supporter une part de dépenses plus élevée" ainsi que, toujours "à la même majorité, la répartition des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés".

Une des difficultés réside dans le fait de mettre au point et faire accepter ces deux nouvelles grilles de répartition, qui devront une fois adoptées être publiées au fichier immobilier et deviendront partie intégrante du règlement de copropriété.

Le principe communément retenu pour l'élaboration de ces grilles consiste à partir des tantièmes généraux des lots desservis - les lots du rez-de-chaussée n'en font pas partie, de même que les lots en sous-sol si l'ascenseur n'y descend pas - et à leur appliquer un coefficient de majoration en fonction de l'étage (le 1er sous-sol comptant comme le 1er étage etc.). L'utilisation des tantièmes généraux se justifie par le fait qu'ils sont en grande partie fonction de la surface de chaque lot, et qu'il est largement admis que l'ascenseur leur profite proportionnellement à cette dernière, ne serait-ce que sur le plan de la valorisation...

C'est d'ailleurs ce critère qui est communément admis comme représentatif de l'"avantage" mentionné par l'article 30 de la loi pour l'élaboration de la première grille, celle de répartition des frais d'installation.

Par contre, la grille de répartition des "dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés" doit répondre au critère de "l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot" (article 10 de la même loi), ce qui n'est pas exactement la même chose.

Une des références pour le calcul de ces coefficients est la méthode élaborée par Bernard Quignard, expert reconnu de l'ascenseur et auteur d'un ouvrage intitulé fort à propos "Ascenseur et copropriété" (Editions Eyrolles, avril 2000).

Pour les frais d'installation, la méthode donne des coefficients partant de 1 pour le premier étage et progressant de 0,5 à chaque étage, avec éventuellement des ajustements lorsqu'il s'agit de chambres de service, ou si l'ascenseur dessert des demi-étages.

Pour les frais de fonctionnement et d'entretien, la méthode est plus complexe : elle fait intervenir l'"utilité objective", dont la mesure seront les frais de fonctionnement (électricité, entretien, etc.) augmentant proportionnellement avec l'étage, et l'"utilité subjective" qui prend en considération le gain de temps et l'économie d'effort physique, qui croissent dans des proportions différentes.
Cela donne une grille qui commençant à 1, croît d'1/3 de point par étage...

On notera que la répartition se fait au lot et en aucun cas à l'étage comme on entend préconiser à tort ici et là !

Compte tenu du niveau de majorité nécessaire et de la radicalisation fréquente des oppositions qu'un tel projet suscite, la prise de décision n'est pas facile et les partisans de l'ascenseur doivent s'y reprendre à plusieurs fois avant d'obtenir la majorité nécessaire...
Il faut aussi compter avec les tentatives d'annulation de la décision en justice, qui peuvent retarder la mise en oeuvre de la décision de plusieurs années, ou les demandes de bénéficier des dispositions de l'article 33 de la loi précitée qui permet aux opposants au projet de payer le coût des travaux par annuités sur 10 ans (avec toutefois des intérêts au taux légal...) !

Dans le cas de situations bloquées, certains peuvent être alors tentés par la solution consistant pour les partisans de l'ascenseur de se faire autoriser par l'assemblée de le réaliser à leurs frais, en application de l'article 25 b de la loi ou à défaut par le tribunal en application de l'article 30, qui dispose que "lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu'il est possible d'en réserver l'usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu'en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée"...

Disons-le tout net : c'est une solution détestable - tout le monde connaît ces immeubles où les ascenseurs ne s'arrêtent pas à tous les étages ! Elle donne une très mauvaise image de la copropriété, qui étale ainsi ses divisions et son incapacité de s'accorder sur un investissement qui pourtant la valorise (que penser de sa capacité à préserver l'immeuble), et elle est très difficile à mettre en oeuvre et notamment dans la durée ! Au demeurant, ni la création d'un ascenseur dans ces conditions ni son entretien ne devraient s'effectuer dans le cadre du syndicat, puisque tant l'article 25 que l'article 30 mentionnent l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'"exécuter" les travaux à leurs frais, non de les faire exécuter par le syndicat des copropriétaires. L'ascenseur ainsi créé n'est donc pas une partie commune du syndicat des copropriétaires mais la propriété de ceux qui l'ont financé.

Les syndics ne devraient donc prendre en charge la maîtrise d'ouvrage de la réalisation de l'ascenseur puis sa gestion qu'aux termes d'une convention à conclure entre les "financeurs" et le syndicat des copropriétaires, à faire avaliser par l'assemblée, qui prévoirait les responsabilités respectives, la prise en charge par les seuls "financeurs" du supplément de salaire du gardien s'il en existe un ainsi que de la rémunération spéciale du syndic pour toute cette prestation (que les autres copropriétaires n'ont pas lieu de supporter) enfin les modalités précises - complexes à définir - du rachat - devant notaire ? - des quotes-parts par les copropriétaires qui décideraient de bénéficier après coup de l'équipement créé...

On aura compris que nous déconseillons cette solution !...



A lire également :
- Mise en conformité des ascenseurs : des modalités contestées, un planning très contraint

- fiche technique sur les ascenseurs.

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