C'est ce qui, d'après notre confrère Batiactu qui en a fait le compte-rendu, semble ressortir des travaux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST), qui s'est interrogé sur les moyens du bâtiment à relever les défis de l'innovation. Cédric Villani, mathématicien de renom et récent député de LREM, a présidé le 26 juillet 2017, sa première réunion de travail sur ce thème. Intervenant en ouverture de la séance, Francis Allard, du Laboratoire des sciences de l'ingénieur pour l'environnement, spécialiste des questions de l'énergie dans le bâtiment, a déploré que le secteur du bâtiment, générant un chiffre d'affaires de 130 milliards d'euros par an, n'alloue que 0,1% de ce montant à la recherche et développement, contre 2% en moyenne dans les autres industries ! Alors que les enjeux sociétaux sont de taille : minimiser la demande d'énergie sans nuire au confort ni à la santé, limiter l'impact environnemental à l'échelle locale et enfin éradiquer la précarité énergétique", a-t-il énuméré. Et pourtant, les recherches se heurtent à des budgets décroissants (seuls 1 à 2 projets par an sont soutenus par l'ANR dans le vaste secteur du bâtiment/urbanisme/mobilité), à des effectifs trop faibles et à des difficultés à mobiliser toute une communauté sur des problèmes pourtant cruciaux.
Pour Didier Roux, membre de l'Académie des technologies, exprimant le point de vue de l'industrie sur le marché français, le principal besoin est que le client final soit satisfait ; or des études comme celles de l'UFC-Que Choisir sur les promoteurs-constructeurs de maisons individuelles et sur la rénovation énergétique et le label RGE montrent qu'ils sont déçus. Ancien directeur de la recherche et de l'innovation de Saint-Gobain, il estime qu'un autre problème est celui du déficit d'amélioration de la productivité du travail. "Elle a été multipliée par 16 dans l'industrie entre 1950 et 2015, mais seulement par 3 dans le bâtiment, et elle est même en recul depuis une quinzaine d'années", souligne-t-il. Egalement, le marché souffrirait d'un manque de confiance entre les consommateurs finaux et les acteurs du secteur. Sur la rénovation énergétique, il se montre également critique, jugeant "ridicule" la bataille entre les énergies et le déséquilibre entretenu en défaveur de l'électricité pourtant décarbonée : "On peut parfaitement chauffer un bâtiment à l'électricité s'il est bien isolé...
Autre intervenant, Etienne Wurtz, directeur de recherche au CEA-Ines de Chambéry, a présenté tous les progrès réalisés dans l'isolation des bâtiments, notamment au moyen d'aérogels projetés ou en plaques, ou de menuiseries performantes. Selon lui, avant d'en arriver à une rénovation industrialisée des logements par des équipements et enveloppes intégrées, il sera nécessaire de résoudre les problèmes de gestion des interfaces entre les produits et matériaux. C'est pourquoi il demande un "droit à l'expérimentation" et à l'erreur... Selon lui, le déploiement de capteurs photovoltaïques se généralisera à l'ensemble des éléments des bâtiments comme les tuiles et vitrages. Et il regrette la situation problématique du solaire thermique, "pourtant une solution de chauffage et d'eau chaude sanitaire de demain", rejetée en raison de déboires passés. Etienne Wurtz estime enfin que la problématique de qualité de l'air intérieur doit venir en tête de l'ordre du jour de l'office, et ne pas être étouffée par l'approche bas carbone de la future réglementation environnementale du bâtiment, attendue pour 2020 !
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