La ministre de l'égalité des territoires et du logement, Cécile Duflot, qui doit présenter un premier projet de loi "logement" en conseil des ministres, ce 5 septembre, en dévoilé le contenu à la presse. Il vise à permettre de mettre en route des programmes de construction de 150.000 logements sociaux par an à compter de 2013, objectif de la campagne de François Hollande réitéré par le gouvernement comme un impératif absolu, en mêlant coercition à l'égard des villes situées dans des "zones tendues" et coup de pouce énergique de l'Etat pour la mise à disposition de foncier public à bas coût, pouvant aller jusqu'à la gratuité.
Or l'objectif est ambitieux : le nombre de HLM financés en 2012 sera en en dessous des 100.000 logements, en baisse par rapport à 2011 (110.600) qui bénéficiait encore du plan de relance...
Le projet de loi durcit les contraintes de la loi "SRU" (solidarité et renouvellement urbains) du 13 décembre 2000 pour les communes déjà concernées par son article 55 - les communes de plus de 1.500 habitants en Ile-de-France et 3.500 en régions - et situées dans des secteurs où il y a pénurie de logements sociaux. Il porte de 20 à 25% la part minimale de logements sociaux dans ces communes par rapport à l'ensemble du parc de logements, avec cependant un horizon d'ici à 2025 au lieu de 2020 actuellement. Dans les territoires où un effort de production ne se justifie pas, l'obligation de 20% à l'horizon 2020 restera inchangée.
Par ailleurs, afin de mieux assurer le respect de cette contrainte - 140 euros en moyenne par logement manquant, beaucoup de communes s'en affranchissant aujourd'hui délibérément en choisissant de payer l'amende - les pénalités dues par les communes qui ne respectent pas leurs objectifs triennaux de production de logements sociaux seront multipliées par 5 et le seuil plafonnant les pénalités pour les communes les plus riches passera de 5 à 10% des dépenses réelles de fonctionnement pour les communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur à 150% du potentiel fiscal par habitant médian des communes prélevées. Le fruit des prélèvements sera désormais versé en priorité aux intercommunalités délégataires des aides à la pierre, puis aux établissements publics fonciers pour leur permettre d'acquérir le foncier nécessaire à la construction de logements sociaux. Les pénalités (majorations du prélèvement) seront quant à elles versées à un fonds permettant de financer les logements destinés aux personnes le plus en difficulté. Enfin, l'agglomération ne pourra plus reverser une partie des pénalités aux communes prélevées (abrogation des dispositions de
l'article 57 de la loi SRU).
Quant au caractère tendu du marché locatif qui justifiera la majoration à 25% de l'objectif, il ne résultera plus d'un zonage mais des données qui seront fournies par les observatoires que le gouvernement prévoir de déployer à compter de 2013 pour gérer l'encadrement des loyers (un 2ème projet de loi en ce sens, comportant notamment une réforme importante de la loi de 1989 régissant les rapports locatifs, est prévue pour une adoption au printemps 2013).
Pour remédier à la pénurie de foncier, qui freine la construction dans les zones tendues et notamment en région parisienne, l'Etat ou certains opérateurs publics (SNCF, Réseau ferré de France, Assistance publique...) pourront céder aux collectivités locales les terrains dont ils n'ont plus l'utilité avec une décote supérieure à ce qui est permis aujourd'hui (35%), pouvant aller jusqu'à la gratuité. Le taux de décote dépendra de la nature des logements projetés et de la situation du terrain.
D'ici à 2016, le gouvernement prévoit la cession de 930 sites, qui représentent 2.000 hectares, et sur lesquels seraient construits 110.000 logements - dont près de la moitié en Ile-de-France.
En contrepartie, l'acquéreur (collectivités locales, établissements publics fonciers locaux, organismes constructeurs de logements sociaux...) devra s'engager sur un cahier des charges, et l'avantage financier résultant de la décote devra être intégralement répercuté dans le prix de revient des logements sociaux (location ou accession à la propriété).
Interrogée sur le coût pour l'Etat et les opérateurs de la décote sur la vente des terrains, Cécile Duflot rappelle que la construction de logements sociaux est un impératif catégorique, et que de surcroît l'Etat en sort bénéficiaire, notamment grâce à la TVA générée. Cela compense son manque à gagner propre, et devrait même lui donner les moyens de le compenser pour les opérateurs qui ne pourront plus bénéficier de la ressource comme leurs plans d'investissements le prévoyaient...
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