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Le plan comptable des copropriétés : les vrais enjeux Le 14/2/2001
UI - Actus - 14/2/2001 - Le plan comptable des copropriétés : les vrais enjeux
C’est en apparence une des dispositions concernant le fonctionnement des copropriétés les moins excitantes de la loi du 13 décembre 2000, dite loi « SRU » : celle qui prévoit que les comptes des syndicats de copropriétaires devront être conformes à des « règles comptables spécifiques fixées par décret ». Elle mériterait pourtant d’éveiller un large intérêt, car son enjeu, à condition que les commissions de travail qui vont se mettre en place pour lui donner un contenu n’accouchent pas d’une souris, n’est rien moins que l’information des copropriétaires et des candidats acquéreurs sur la situation financière réelle de la copropriété, et surtout l’existence ou non de débits ou passifs cachés, et de créances douteuses !

Protectrice des intérêts des copropriétaires en place, cette disposition l’est tout autant de ceux des candidats acquéreurs ! En cela elle constitue un complément judicieux à celle instituant pour les acquéreurs non professionnels un délai de rétractation de 7 jours à compter de la notification de la promesse ou du compromis de vente qu’ils auront signé pour l’achat d’un bien immobilier, ceux-ci pouvant comme nous l’indiquions dans un précédent article mettre à profit ce délai de réflexion pour en savoir un peu plus sur l’immeuble et sur la situation financière du syndicat des copropriétaires dont ils vont normalement devenir membres…

Et c’était urgent, tant aujourd’hui la comptabilité des copropriétés ressemble à s’y méprendre à une zone de non-droit ! Au point que personne n’avait relevé que les syndicats des copropriétaires – horreur ! – n’étaient pas exclus du champ d’application de la loi du 6 avril 1998 portant réforme de la réglementation comptable, et qu’il a fallu mentionner cette exclusion en catastrophe dans la loi « SRU » en contrepartie de l’adoption du principe de la fixation de règles spécifiques, dont celle …de la comptabilité d’engagement (enregistrement des produits et des charges dès leur engagement juridique et non leur encaissement ou leur décaissement), qui est pourtant le B A BA de tout comptable débutant !

Non soumis aux règles comptables s’imposant dans le reste du monde, les comptes soumis aux assemblées générales et consultables par les acquéreurs peuvent aujourd’hui cacher des débits inavoués ou de véritables bombes à retardement : engagements de dépenses ou factures litigieuses qui n’apparaîtront que dans les comptes de l’exercice où elles seront réglées, dépenses cachées dans des comptes « fourre-tout » qui n’éveillent pas l’attention parce qu’ils sont créditeurs, enfin décaissements futurs d’indemnités ou de dommages et intérêts en raison de procédures en cours, quand ce n’est pas le remboursement éventuel d’indemnités perçues et réparties parce que l’adversaire a fait appel…

Les comptes présentés peuvent traîner pendant des années des créances devenues largement irrécouvrables, ou des débits que personne – syndic comme conseil syndical – n’ose répartir aux copropriétaires par crainte de s’attirer des questions gênantes…

Il faut aussi mentionner les difficultés de rapprochement des dépenses sur sinistres avec les indemnités perçues, ou de mise en évidence des débits non récupérés sur les copropriétaires partis, souvent globalisés avec les soldes créditeurs en attente de remboursement – ou réclamation – heureusement plus nombreux…

Et bien évidemment, il n’est pas question de provisionner comme tout le monde pour les charges futures, pourtant prévisibles avec un grande précision concernant l’entretien du bâti !

Devant un tel archaïsme, la question est de savoir si tous les groupes de travail qui vont « plancher » sur le sujet pour permettre au gouvernement de sortir son décret en temps utile – prudent, il a fixé la date d’entrée en vigueur de la disposition au 1er janvier …2004 ! – oseront émettre des règles suffisamment contraignantes, comme elle le sont pour les entreprises – mais aussi les associations, ou si elles se laisseront attendrir par les plaintes des syndics et de tous ceux qui en leur nom mettent en avant les pauvres syndics bénévoles qu’il ne faut surtout pas décourager, argument inlassablement repris au cours des débats parlementaires pour gommer les témérités des premières rédactions du projet de loi, alors que ces derniers ne sont pas forcément les plus réticents ni les moins capables…

D’autant qu’il ne faut pas se leurrer : le lobby des professionnels et des partisans de la bonne franquette sera épaulé par les copropriétaires, qui ne sont pas prêts non plus à accepter de se voir répartir des provisions pour créances douteuses ou pour risques de pertes et charges, et ils n’ont pas forcément tort : du moins tant que les acquéreurs ne paieront pas plus cher au m2 dans une copropriété financièrement saine par rapport à une copropriété minée ou aux abois !…

Enfin, quand se rendra-t-on compte que dans les grosses copropriétés, brassant plusieurs millions de francs par an quand ce n’est pas des dizaines, on ne peut se fier, pour sécuriser quant à la sincérité des comptes la grande masse des copropriétaires et les acquéreurs potentiels, à des particuliers ni même à des collaborateurs d’associations de consommateurs, trop vite formés, et qu’il faut avoir recours à ceux dont c’est le métier et qui présentent les garanties professionnelles nécessaires : nous avons nommé – ô surprise – les experts comptables et commissaires aux comptes…

Ce serait peut-être la fin de la suspicion !

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