samedi
matin, alors que les pompiers de Paris avaient été
appelés pour une fuite de gaz au 5 de la rue
de Trévise, dans le 9e arrondissement, une explosion
de grande violence pulvérisait l'immeuble, ébranlant
jusqu'aux fondations, atteignant les immeubles alentour,
pulvérisant les vitrines, les véhicules
stationnés et tuant trois personnes. Parmi elles,
deux militaires des sapeurs de Paris. Des dizaines de
victimes sont encore en train de se battre pour survivre
à leurs blessures. L'émotion, la compassion
envers celles et ceux qui viennent de perdre un proche
priment. Pourtant, il ne doit plus être question
désormais que d'une préoccupation: qu'une
telle tragédie ne se reproduise pas.
Or,
on a entendu que le réseau de gaz des immeubles
parisiens était gravement malade et que derrière
cette catastrophe le risque que d'autres se produisent
était considérable. En fait, le problème
de l'obsolescence, du moins de la sénescence
des immeubles de nos patrimoines urbains se posent de
la façon la plus cruelle, et la quasi concomitance
des événements de Marseille et de Paris
n'est pas un hasard. Certes, on avait à Marseille
une majoration du risque due à la sociologie
des occupants, pauvres pour la plupart, sans moyens
d'entretenir leur copropriété, mais il
reste que nos immeubles sont marqués par leur
âge. Ceux qui ont assisté au débat
qu'avaient organisé pour le jubilé de
la loi du 10 juillet 1965 les organisateurs Salon de
la copropriété se rappellent ce qu'avait
répondu le regretté Pierre Capoulade,
auteur du texte, à la question " Êtes-vous
confiant quant à l'avenir de votre loi? ".
Il avait avoué son pessimisme, pour des raisons
non pas juridiques, mais techniques et économiques.
Il ne voyait pas comment les copropriétaires
pourraient faire dace aux nécessaires travaux
de maintenance et de rénovation.
Certes,
la question de la solvabilité des ménages
est cardinale. Elle n'est peut-être pas la plus
lourde: les copropriétaires assignent-ils à
leur syndic la mission prioritaire de veiller à
la sécurité durable de leur immeuble?
Ne se voilent-ils pas ma face au moment d'obtenir un
diagnostic honnête de l'état du bâti?
Sont-ils prêts à entendre la vérité?
De leur côté, les syndics professionnels
ont-ils toujours le courage d'être porteurs de
mauvaises nouvelles? Il s'ajoute à cette affaire
que l'identification de la responsabilité des
parties renvoie aussi aux collectivités locales
et aux opérateurs de réseau. Il y a une
omerta qui profite à tous, et qui coûtera
à tous. ENGIE, le leader en situation de quasi
monopole, fait-il ce qu'il doit faire? Les élus
ont-ils conscience du phénomène? Prennent-ils
la mesure de sa gravité?
Il
s'impose aujourd'hui une revue générale,
nationale s'entend, de l'état des installations.
Les syndics ne peuvent plus engager leur responsabilité
sans savoir si les immeubles qu'ils reçoivent
mandat de gérer ne sont pas d'authentiques bombes
à retardement. Le ministre de la ville et du
logement a prouvé à Marseille qu'il savait
mobiliser les énergies, et la région PACA
ne s'est pas dérobée à ses obligations.
Cela dit, le pays ne peut plus réagir de façon
impressionniste, au cas par cas des villes malades.
On peut présupposer que toutes les communes sont
atteintes: " Ils ne mouraient pas tous, mais tous
étaient frappés " pour citer Jean
de la Fontaine dans Les animaux malades de la peste.
Au passage, c'est le rôle fondamental du syndic
qui va se trouver réhabiliter et il n'est que
temps que les copropriétaires comme les professionnels
eux-mêmes se souviennent que la gestion d'un immeuble
dépasse le pilotage des passions internes et
la maintenance quotidienne des parties communes.
Par
Henry
Buzy-Cazaux, président de l'Institut
du Management des Services Immobiliers (IMSI)
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